Revivez la conférence de presse d'Emmanuel Macron

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Fiscalité, démocratie, climat… Le chef de l'État a présenté jeudi, pendant 2h30, ses annonces pour sortir de la crise déclenchée en novembre dernier par les "gilets jaunes".

C'est une étape majeure du quinquennat d'Emmanuel Macron, deux ans après son accession à l'Élysée. Pour présenter ses annonces en clôture du "grand débat national", le chef de l'État a tenu une conférence de presse devant plusieurs centaines de journalistes, jeudi. L'occasion de multiplier des annonces dans des domaines aussi variées que le pouvoir d'achat, les retraites ou la fonction publique.

Les informations à retenir :

  • Dans un propos liminaire, Emmanuel Macron a commencé par annoncer des mesures institutionnelles et fiscales
  • Il a ensuite détaillé des mesures pour le pouvoir d'achat, notamment des retraités
  • Sont ensuite venues les questions des journalistes

Benalla "a fait des fautes très graves"

Interrogé sur l'affaire Alexandre Benalla et s'il regrettait de l'avoir embauché, Emmanuel Macron a pris (beaucoup) de temps pour répondre. "C'est trop facile de regretter", a-t-il déclaré. "Est-ce que je pense qu'au moment où j'étais élu, connaissant ce jeune garçon qui avait vraiment du talent, je regrette de l'avoir embauché à l'Élysée ? Non car c'était extrêmement cohérent avec nos valeurs. C'est sans doute pour cela que je lui en veux encore plus. Il a fait des fautes, très graves. Les sait-on toutes aujourd'hui ? Je ne sais pas."

"Je pense que je peux mieux faire"

Interrogé par une journaliste sur la signification de ce grand débat et de ces annonces, Emmanuel Macron en a profité pour exprimer sa vision de sa fonction. "On attend énormément du chef de l'État, parfois trop. Parfois je n'avais pas conscience de cette attente", reconnaît-il. "Vous êtes le point de mire en même temps que la clef de voûte." Le chef de l'État estime en outre : "Je pense que je peux mieux faire." Même s'il "ne pense pas avoir été sourd" aux revendications de la rue.

S'il dit "accepter la colère qui va avec" l'attribution du pouvoir, et assume d'être impopulaire, le président trace néanmoins une frontière avec "la haine" qui a pu s'exprimer pendant le mouvement des "gilets jaunes". "Indépendamment de ma personne, la haine qu'on a pu voir déferler à l'égard de ma famille ou des élus de la République, c'est une dilution de la morale collective très profonde."

Laïcité et "islam politique"

Abordant la question de la loi de 1905, Emmanuel Macron répète son attachement au texte qui "doit être réaffirmé et pleinement appliqué". Cependant, il précise que "quand on parle de laïcité, on parle du communautarisme installé dans certains quartiers, d'une sécession, de gens qui, au nom d'une religion, poursuivent le projet d'un islam politique". Et promet "d'être intraitable" là-dessus. Un sujet qui ne figurait pas dans le brouillon d'allocution qui a été révélé par la presse.

Des mesures pour le climat

Sur le climat, Emmanuel Macron veut "changer plus fortement de méthode". Il annonce notamment la mise en place d'un "conseil de défense écologique qu'[il] présidera de manière régulière pour mettre au cœur de notre politique cette urgence écologique". Par ailleurs, le chef de l'État souligne que le bon niveau d'action est celui de l'Union européenne. Il veut défendre "un prix minimum du carbone" et "une taxe carbone aux frontières" de l'Union. 

...et pour le pouvoir d'achat

Emmanuel Macron suit les annonces qui avaient fuitées dans la presse sur le volet pouvoir d'achat. Il annonce la "répétition cette année de la prime exceptionnelle" défiscalisée et désocialisée, distribuée par les entreprises volontaires à leurs salariés en fin d'année. En outre, il confirme la ré-indexation des retraites de moins de 2.000 euros au 1er janvier prochain. Il n'y aura "plus de sous-indexation [sur aucune pension] à partir de 2021", promet également le chef de l'État.

Pour les mères célibataires, Emmanuel Macron promet de nouveau de mobiliser les CAF pour "prélever directement les pensions alimentaires" non payées par les ex-conjoints. 

Baisses d'impôts pour les classes moyennes

Le chef de l'État promet des "baisses d'impôts" pour les classes moyennes, "mises en oeuvre par la suppression de niches fiscales et l'augmentation du temps de travail". "Alors nous pourrons rendre aux classes moyennes ses parts de l'effort", estime-t-il. Plus tard, Emmanuel Macron précise un peu les choses. D'abord, les niches fiscales rabotées concerneront les entreprises, et non les ménages. Au total, la baisse d'impôts devrait se chiffrer à environ cinq milliards d'euros. "Ce sera significatif, je pense que ce serait une bonne chose." Par ailleurs, l'augmentation du travail ne correspondra ni à la suppression d'un jour férié, ni à une remise en cause des 35h, ni à un changement d'âge légal de départ à la retraite. Le président préfère inciter à cotiser plus longtemps. "On doit travailler plus longtemps parce qu'on vit plus longtemps, c'est plutôt de bon sens."

Emmanuel Macron défend la refonte de l'ISF en IFI, "une réforme pour produire et non pour faire un cadeau aux plus aisés". 

Des annonces sur la (haute) fonction publique

Emmanuel Macron reconnaît la nécessité de réformer la haute fonction publique, et donc de supprimer l'ENA. "Je ne crois pas au rafistolage. Je souhaite que nous mettions fin aux grands corps", justifie-t-il. "Nous n'avons plus besoin de protection à vie." "Il ne s'agit pas de dire que l'ENA est mauvais en soi, mais si on veut une réforme audacieuse, il faut rebâtir. On doit avoir un geste large."

Sur le reste de la fonction publique, le président se dit prêt à "abandonner" l'objectif de 120.000 suppressions de postes de fonctionnaires qu'il avait fixé "si ce n'est pas tenable", demandant au gouvernement de lui "donner son analyse d'ici l'été". "Quand on doit réinvestir dans la sécurité, dans l'éducation et dans la justice, je ne vais pas donner des injonctions contradictoires au gouvernement."

Concernant l'organisation de la fonction publique, Emmanuel Macron penche pour un nouvel acte de décentralisation. "Je veux qu'on remette plus de fonctionnaires sur le terrain et qu'on supprime plus de postes en administration centrale. Nous avons trop de monde à Paris. Le Premier ministre aura à présenter une profonde réforme de notre administration."

De la proportionnelle mais pas de vote obligatoire ni de vote blanc

Emmanuel Macron fait de premières annonces institutionnelles. Il promet notamment une "part significative de proportionnelle", à 20%, pour les élections du Parlement. Le nombre de parlementaires sera, lui, baissé de 25 à 30%. En revanche, le président ne "retiendra pas l'option" du vote obligatoire. "Je ne crois pas qu'on répond à la crise démocratique par la contrainte", justifie-t-il. Celle de la reconnaissance du vote blanc n'a pas non plus sa préférence. "Blanc ça ne décide pas, c'est trop facile, c'est l'agrégation des rejets", estime le chef de l'État. 

En revanche, il souhaite "aller plus loin sur le référendum d'initiative partagée". Au niveau local, le président pense judicieux de permettre aux citoyens, "au-delà d'un certain seuil", de mettre sur la table certains sujets. Il ne parle cependant pas de "RIC" [référendum d'initiative citoyenne], contrairement à ce que contenait son projet d'allocution diffusé par la presse la semaine dernière. Une réforme constitutionnelle sera proposée "à l'été".

Les "revendications légitimes" des "gilets jaunes"

Emmanuel Macron commence par analyser le mouvement des "gilets jaunes", à l'origine du grand débat national et donc de cette conférence de presse. "Un mouvement inédit qui a dit sa colère, son inquiétude, son impatience que les choses aillent plus vite", note le chef de l'État. S'il souligne les violences intervenues en marge de nombre de manifestations, "je ne veux pas que les dérives de quelques-uns occultent les revendications légitimes portées à l'origine de ce mouvement", précise-t-il.

Reconnaissant qu'il a "beaucoup appris" du mouvement, Emmanuel Macron souligne le "profond sentiment d'injustices fiscale, territoriale, sociale" qui remonte des conclusions du grand débat. "Un sentiment de manque de considération" aussi, de la part de citoyens qui "ne se sentent pas respectés". "Il y a des angles morts, des vies oubliées de nos politiques et nos discours. Notre projet doit être plus juste." Néanmoins, pas question de remettre en cause son début de quinquennat. "Je pense très profondément que les orientations prises ces deux premières années ont été justes à bien des égards."