Le Premier ministre a annoncé lundi "un remaniement technique", pratique coutumière au lendemain d'élections législatives. Après avoir posé sa démission, comme le veut l'usage républicain, Édouard Philippe a été immédiatement reconduit à Matignon et chargé de mettre en place un nouveau gouvernement.
Mais avec le départ de Richard Ferrand, ministre de la Cohésion des Territoires, envoyé par le président de la République à l'Assemblée nationale pour encadrer les nouveaux députés de la majorité, et l'annonce surprise de Sylvie Goulard, qui demande à ne pas être reconduite au ministère des Armées, la réorganisation s'annonce plus large que prévue. Le chef du gouvernement a jusqu'à mercredi, 18 heures, pour mettre en place la nouvelle équipe.
Les 3 informations à retenir :
- Le nouveau gouvernement sera annoncé avant mercredi 18 heures
- Richard Ferrand, ministre de la Cohésion des Territoires, va briguer la présidence du groupe En marche! à l'Assemblée
- Sylvie Goulard a demandé à ne pas être reconduite aux Armées
Richard Ferrand, exfiltré ? L'intéressé l'assure, il ne s'agit pas d'une sanction mais d'un "grand honneur". La place de Richard Ferrand au gouvernement a été mise à mal ces dernières semaines par des révélations sur ses activités au sein des Mutuelles de Bretagne. Son sort était soumis au choix des électeurs, selon la règle édictée par Emmanuel Macron. Réélu dimanche dans la 6e circonscription du Finistère, le ministre perd pourtant sa place, envoyé à la demande du président au Palais Bourbon pour briguer la présidence du groupe En marche!.
"Je n'ai pas dû quitter le gouvernement", a-t-il expliqué mardi matin au micro d'Europe 1. "C'est le président de la République, en confiance, qui a jugé que ce serait une bonne chose si j'acceptais de prendre cette responsabilité", a-t-il voulu préciser, assurant qu'il s'agissait d'une démarche mûrie de longue date. "C'est quelque chose que nous avons évoqué il y a fort longtemps, avec différentes hypothèses de travail". Une manière néanmoins pour le chef de l'Etat d'anticiper une nouvelle polémique si son ministre venait à être inquiété par la justice.
Sylvie Goulard s'en va. La nouvelle est tombée par communiqué de presse mardi, en fin de matinée. "J’ai demandé au président de la République, en accord avec le Premier ministre, de ne plus faire partie du gouvernement". Citée dans l'enquête préliminaire sur les assistants des élus MoDem au Parlement européen, Sylvie Goulard, ministre des Armées, veut avoir les coudées franches pour assurer sa défense et ne pas pénaliser l'exécutif si la justice venait à lui demander de s'expliquer. "Dans l’hypothèse où l’enquête préliminaire visant le MoDem conduirait à vérifier les conditions d’emploi de mes assistants au Parlement européen, je souhaite être en mesure de démontrer librement ma bonne foi et tout le travail que j’y ai accompli", a fait valoir l'ex-eurodéputée.
Bayrou et Sarnez sur la sellette ? Le départ de Sylvie Goulard crée un précédent qui met à mal la position de François Bayrou, garde des Sceaux, et de Marielle de Sarnez, ministre chargée des Affaires européennes. En effet, le fondateur du MoDem et sa vice-présidente pourraient également tomber sous le coup de la justice dans la même affaire. Une enquête préliminaire visant directement Marielle de Sarnez, mais aussi 18 autres eurodéputés français, a d'ailleurs été ouverte fin mars. Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Environnement de Jacques Chirac, était entendue comme témoin mardi dans cette enquête. Élue dimanche député de la 11e circonscription de Paris, Marielle de Sarnez a indiqué mardi au Parisien qu'elle pourrait éventuellement briguer la présidence du groupe MoDem dans l'hémicycle, si Emmanuel Macron lui demandait. Une façon de se ménager une sortie par le haut, à la manière de Richard Ferrand.
Le cas de François Bayrou s'avère plus épineux, dans la mesure ou le ministre de la Justice est chargé de conduire la première grande réforme du quinquennat, sur la moralisation de la vie publique. Il n'a pourtant pas échappé à un recadrage en règle de la part d’Édouard Philippe, la semaine dernière, après s'être plaint auprès de Radio France d'une enquête journalistique conduite sur son parti. "Le truc est assez simple, quand on est ministre on ne peut réagir comme quand on est un simple citoyen", a voulu rappeler le chef du gouvernement sur le plateau de franceinfo. "Chaque fois qu'il y aura quelque chose à dire à des Français, à des responsables, qu'ils soient politiques, qu'ils soient journalistiques, qu'ils soient médiatiques, chaque fois qu'il y aura quelque chose à dire, je le dirai", lui a répondu dans la foulée l’intéressé en marge d'un déplacement à Lens.
Une chose est sûre : après la large victoire des candidats de La République en marche! aux législatives dimanche, assurant à Emmanuel Macron une majorité absolue sans avoir à s'appuyer sur ses alliées du MoDem, le poids politique de l'ex-maire de Pau au sein de l'exécutif s'est amoindri.