La suppression du droit du sol, une solution efficace pour endiguer la crise à Mayotte ? Depuis trois semaines, l'île fait face à la colère de ses habitants, exaspérés par une crise migratoire continue, à laquelle ils associent une hausse de l'insécurité. Plusieurs barrages routiers ont été mis en place en guise de protestation et plusieurs collectifs ont dressé une liste de revendications à destination du gouvernement. En réponse, Gérald Darmanin a annoncé mettre en place une révision constitutionnelle exceptionnelle pour ce département : la fin du droit du sol.
Une mesure inadaptée pour Manuel Bompard, coordinateur national de La France insoumise et député de Marseille. Invité de la Grande interview Europe 1/CNews, le député pointe notamment du doigt un abandon du territoire par la République.
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Le droit du sol, "pilier fondamental de notre République"
"La proposition de Monsieur Darmanin ne figure pas dans la liste des revendications qui a été dressée. Ce n'est pas la première fois qu'à Mayotte, il y a des mobilisations importantes. La situation est effectivement de plus en plus grave et malheureusement, elle s'est aggravée parce que les demandes qui ont été faites précédemment par la population mahoraise n'ont pas été suivies d'effet. Il y a des demandes d'investissement massives pour faire en sorte que, par exemple, les services publics à Mayotte soient à l'image et à la hauteur de ce qu'on attend de la République française", explique Manuel Bompard.
"Je crois que pour résoudre les problèmes de Mayotte, on n'a pas besoin de moins de République, on a besoin de plus de République et donc certainement pas le fait d'entamer le droit du sol qui est un des piliers fondamental de notre République", ajoute-t-il au micro de Sonia Mabrouk.
Un droit du sol déjà modifié en 2018
Surtout que le droit du sol à Mayotte a déjà été modifié en 2018, rappelle le membre de La France insoumise. Avec la loi asile et immigration de 2018, un enfant né à Mayotte doit non seulement avoir vécu en France pendant au moins cinq ans depuis l’âge de 11 ans, comme dans l'Hexagone, mais, en plus, prouver au moment de faire sa demande que l’un de ses parents était légalement sur le territoire français depuis au moins trois mois au moment de sa naissance.
Autre dérogation, plus vieille encore : quand un étranger obtient un titre de séjour dans l’Hexagone, il peut aller et venir sur le territoire jusqu’à la fin de validité de son titre. À Mayotte, le titre de séjour n’est valable que sur l’île. Il faut demander un visa pour rejoindre la métropole ou d’autres territoires d’outre-mer, détaille le journal La Croix. "Est ce que, à un seul moment, quelqu'un a été capable de dire que cette mesure a permis de réduire l'attractivité ?", interroge Manuel Bompard.
Pour le député, il est nécessaire de mettre en place un grand plan d'investissement dans les services publics, mais aussi relancer le rapport de force avec les Comores. "Les Comores ont une responsabilité pour maîtriser la fuite de leurs populations, mais aussi qu'on les aide pour participer d'un co-développement. La situation, elle, ne sera pas simple. À mon avis, il faut travailler sur tous ces sujets en même temps", conclut-il.