L'ancien ministre de l'Intérieur Claude Guéant a fait condamner jeudi l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine pour diffamation. Ce dernier avait affirmé dans le média Mediapart avoir remis cinq millions d'euros d'argent libyen pour le financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.
Des allégations dénoncées par Ziad Takieddine et Nicolas Sarkozy
Le tribunal correctionnel de Paris a condamné Ziad Takieddine à 8.000 euros d'amende pour ses propos tenus dans un entretien vidéo paru le 15 novembre 2016 dans Mediapart. Le patron de Mediapart Edwy Plenel et les trois journalistes auteurs de l'article ont en revanche été relaxés.
Dans la vidéo accompagnée d'un article qui avait été publiée en pleine campagne pour la primaire de la droite, le sulfureux homme d'affaires, présenté comme un intermédiaire dans les relations franco-libyennes, disait avoir convoyé entre novembre 2006 et début 2007 "un total de cinq millions d'euros" dans des valises lors de trois voyages entre Tripoli et Paris. Il affirmait avoir remis ces fonds à deux reprises à Claude Guéant, directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, mais aussi à Nicolas Sarkozy lui-même.
Ces derniers avaient farouchement démenti ces allégations et annoncé des poursuites, mais Nicolas Sarkozy s'est désisté en juillet d'une procédure similaire à celle de Claude Guéant.
"C'est un jugement incompréhensible"
Dans deux jugements distincts portant sur ce même entretien, le tribunal estime que Ziad Takieddine n'a pas apporté "une base factuelle suffisante" pour étayer ses propos et "bénéficier de la bonne foi". Il est donc condamné à 8.000 euros d'amende, mais aussi à verser 6.000 euros de dommages-intérêts à Claude Guéant et 6.000 euros au titre des frais de justice.
"C'est un jugement incompréhensible et inadmissible puisque les propos qui ont valu à Ziad Takieddine une mise en examen sont aujourd'hui jugés diffamatoires", a réagi son avocate, Me Elise Arfi, qui a annoncé son intention de faire appel de ce jugement. Sollicité, Ziad Takieddine n'a pas pu être joint.
Le patron de Mediapart Edwy Plenel relaxé
Edwy Plenel et les trois journalistes cosignataires de l'article, Fabrice Arfi, Nicolas Vescovacci et Karl Laske, sont eux relaxés au titre de la "bonne foi" car dans le cadre d'un entretien, "leur rôle se bornait précisément à poser des questions" à Ziad Takieddine.
Dans cette affaire, Nicolas Sarkozy est mis en examen depuis mars 2018 pour "recel de détournements de fonds publics libyens", "financement illégal de campagne électorale" et "corruption passive". Claude Guéant est lui mis en examen depuis 2015 pour "faux et usage de faux" et "blanchiment de fraude fiscale en bande organisée". Il l'a ensuite été en 2018 pour six chefs supplémentaires, dont "recel de détournement de fonds publics", "corruption passive" ou "complicité de financement illégal de la vie politique".
Ziad Takieddine enfin est mis en examen pour "complicité de corruption", "complicité de détournements de fonds publics par un agent public", et "complicité de trafic d'influence actifs et passifs commis par des personnes exerçant une fonction publique".