L'avocat de Nicolas Sarkozy, accusé d'avoir financé sa campagne présidentielle de 2007 avec des fonds du régime libyen, presse le parquet de Paris d'obtenir des témoignages à décharge non transmis par Tripoli, a-t-on appris dimanche de source proche du dossier, confirmant une information du JDD.
La pièce à l'origine de l'affaire, un faux ? Deux anciens dignitaires libyens, qui soutiennent par ailleurs l'accusation contre l'ex-président français, ont en effet affirmé que la pièce ayant déclenché l'affaire était un faux, dans des témoignages indirectement rapportés par les autorités libyennes cet automne et non versés au dossier. Après avoir eu confirmation du parquet de Paris que ces auditions étaient toujours manquantes, Me Thierry Herzog a demandé au procureur François Molins, dans une lettre du 28 juin dont l'AFP a eu connaissance, de "prendre toutes les mesures utiles" pour que ces pièces soient enfin transmises.
En cause ? Une note libyenne attribuée à Moussa Koussa, ex-chef des services de renseignement extérieur de la Libye, et publiée par Mediapart dans l'entre-deux tours de la présidentielle de 2012, accréditant la thèse d'un financement occulte de 50 millions d'euros. Nicolas Sarkozy avait immédiatement porté plainte pour faux contre Mediapart, mais il a été débouté sur cette question, la cour d'appel de Paris ayant confirmé en novembre le non-lieu rendu par les juges le 30 mai 2016. Son pourvoi en cassation n'a pas encore été examiné à ce jour.
"Ces auditions ne sont pas communiquées". L'ancien président, qui conteste vigoureusement avoir reçu de l'argent du régime de Khadafi, tué en 2011, a été mis en examen le 21 mars pour "corruption passive", "financement illégal de campagne électorale" et "recel de détournement de fonds publics libyens". Les juges d'instruction se sont notamment appuyés sur les témoignages accusateurs de deux proches du "Guide" défunt, entendus fin 2016-début 2017 au centre pénitentiaire d'Al-Hadba (centre), d'où ils ont depuis été exfiltrés : l'ex-Premier ministre Baghdadi Al-Mahmoudi et l'ancien chef des renseignements militaires, Abdallah Senoussi, beau-frère de Khadafi.
Toutefois, la synthèse des autorités libyennes, qui accompagne ces dépositions dont l'AFP a eu connaissance, note que ces deux hommes "ont confirmé que le document attribué à Moussa Koussa ne serait pas authentique et qu'il s'agirait d'un faux", ce qu'aurait aussi affirmé par écrit un troisième protagoniste. "Ces auditions ne sont pas communiquées", avaient d'ailleurs noté les enquêteurs français dans leur analyse de cette synthèse remise en octobre aux magistrats français.