François de Rugy n’est sans doute pas la plus célèbre des personnalités élues au Perchoir dans l’histoire de la 5ème République, mais c’est incontestablement un fin politique. En moins de deux ans, le nouveau président de l’Assemblée nationale a claqué la porte de son parti politique, créé le sien - totalement anonyme -, quitté son groupe à l’Assemblée, participé à une primaire, où il a été largement battu avant de renier son vainqueur, rejoint un mouvement en pleine bourre, En Marche! à l’occasion des législatives, pour enfin devenir mardi le quatrième personnage de l’Etat. Un parcours non dénué de circonvolutions qui ne plaît pas à tout le monde.
De Rugy fut EELV,UDE,participa à la primaire de gauche, sans choix au 2e tour, puis renia son engagement pour soutenir Macron #plastique
— mpdelagontrie (@mpdelagontrie) 27 juin 2017
- Acte 1 : il provoque l’explosion des écologistes
François de Rugy a tout de même de l’expérience à revendre. Il s’est d’ailleurs déjà assis sur le Perchoir, en tant que vice-président de l’Assemblée nationale, poste où il a été nommé le 17 mai 2016, en remplacement de Denis Baupin, poussé à la démission suite à des accusations d’agressions sexuelles. A cette date, il avait déjà - depuis août 2015 - claqué la porte d’Europe Ecologie-Les Verts, dénonçant sa "dérive gauchiste", et créé son micro-parti, le Parti écologiste, composante d’une formation pas beaucoup plus large, L’Union des démocrates et écologistes (UDE). Cela ne l’empêchait pas d’être président du groupe écologiste à l’Assemblée, groupe qu’il quitte, avec cinq autres députés, le 19 mai 2016, provoquant sa dissolution, avant de rejoindre le groupe socialiste en tant qu’apparenté.
Malgré la vice-présidence de l’Assemblée, difficile d'imaginer à François de Rugy un avenir radieux. Mais l’homme est un ambitieux. Il l’a déjà prouvé par le passé. A 27 ans, François Goullet de Rugy, - son vrai nom, qu’il a raccourci - est ainsi devenu adjoint au maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault, qu’il avait pourtant affronté trois ans plus tôt aux législatives. A 33 ans, grâce à un accord avec les socialistes, ce fils d’un couple d’enseignants entre pour la première fois à l’Assemblée nationale. Nous sommes alors en 2007. Mais il siège dans l’opposition. En 2012 en revanche, il est réélu, toujours avec le soutien du PS. Et rêve d’un ministère et s’en ouvre au Premier ministre, un certain… Jean-Marc Ayrault. Peine perdue…
Il doit alors prendre son mal en patience. Et se contenter de la co-présidence du groupe écologiste de l’Assemblée nationale. Un poste qu’il quitte le 13 octobre 2015, remplacé par Cécile Duflot, puis récupère le 12 mars, quand sa camarade Barbara Pompili entre au gouvernement. Un peu plus de deux mois plus tard, il provoque l’explosion de "son" groupe.
- Acte 2 : il participe à la primaire du PS et trahit son vainqueur
C’est en octobre 2016 qu’il repart de l’avant. Il décide de se présenter à la primaire de feu La Belle alliance populaire, émanation ponctuelle du Parti socialiste. Il y gagne une notoriété et soigne son image de député sérieux, travailleur et bon connaisseur des dossiers. Mais son score est d’une insigne faiblesse. Le 22 janvier 2017, au premier tour, il reçoit 3,82% des suffrages. Refusant d’insulter l’avenir, il ne choisit aucun candidat pour le second tour.
Malgré cette lourde défaite. Son objectif premier, se faire un nom, est rempli. Et c’est riche de cette nouvelle notoriété - et sans vergogne - qu’il choisit, malgré son engagement signé de soutenir le vainqueur de la primaire, Benoît Hamon en l’occurrence, de rejoindre Emmanuel Macron, le 22 février 2017. Une trahison pour certains, qui continuent encore aujourd’hui à le rappeler à ses engagements
- Acte 3 : il se met en marche
Politiquement pourtant, le pari est payant. Très payant même. "Je préfère la cohérence à l'obéissance", avait justifié le député, qui avait notamment soutenu la déchéance de nationalité pendant le quinquennat Hollande, dont il a toutefois assuré avoir été "quand même très critique". Et ses électeurs suivent. Le 18 juin, il est ainsi réélu député de Loire-Atlantique avec 66 % des voix. L’homme ne cache pas qu’il vise le Perchoir. Il se déclare candidat très tôt, dès le 20 juin, deux jours seulement après le second tour des législatives
Le bruit court que la présidence sera confiée, pour la première fois de l’Histoire, à une femme selon la volonté du couple exécutif ? François de Rugy ne se démonte pas. Il mène une campagne active auprès de ses collègues députés et dans les médias, si bien que l’Elysée et Matignon deviennent moins affirmatifs au fil des jours. Et mardi, il a fini par être désigné candidat par le groupe La République en marche!, majoritaire, avant d’être logiquement élu au Perchoir. Le voilà en poste jusqu’en décembre 2019, puisque Richard Ferrand a promis que tous les postes obtenus par LREM seront remis en jeu à mi-mandat.
François de Rugy en douze dates :
- 6 décembre 1973 : naissance à Nantes
- 1997 : Adhésion aux Verts
- 2001 : adjoint aux transports à la mairie de Nantes
- 17 juin 2007 : élu député de la 1ère circonscription de Loire-Atlantique
- 20 juin 2012 : réélu député de la 1ère circonscription de Loire-Atlantique
- 27 août 2015 : il quitte Europe Ecologie-Les Verts
- 17 mai 2016 : nommé vice-président de l’Assemblée nationale
- 7 octobre 2016 : candidat à la primaire socialiste
- 22 janvier 2017 : 3,82% des voix au premier tour de la primaire socialiste
- 22 février 2017 : il soutient officiellement Emmanuel Macron
- 18 juin 2017 : réélu député de la 1ère circonscription de Loire-Atlantique
- 27 juin 2017 : élu président de l’Assemblée nationale