L'urgence sociale a primé : mardi, en pleine crise des "gilets jaunes", Édouard Philippe a annoncé plusieurs mesures pour calmer la colère des Français mobilisés notamment contre la fiscalité écologique appliquée par le gouvernement.
Carburants : un "moratoire", ça veut dire quoi ?
Le chef du gouvernement a confirmé le report de six mois de la hausse des taxes sur les carburants de 2,9 centimes sur le litre d'essence et de 6,5 centimes sur le litre de gazole, tout comme la convergence de la fiscalité entre essence et diesel. Le Premier ministre a aussi annoncé le report de six mois du renforcement du contrôle technique, ainsi que le gel des tarifs réglementés de l'électricité et du gaz pendant six mois. Autant de décisions destinées à "apaiser" les "gilets jaunes", mais qui ont coût certain sur le plan budgétaire.
Au moins deux milliards d'euros de recettes en moins
Avec le report de la mise en place de ces mesures, le gouvernement se prive de recettes pour, au moins, les six premiers mois de l'année 2019, soit la durée du moratoire sur les taxes affectant le carburant. Selon Le Parisien, Le Monde et l'AFP, les décisions de l'exécutif devraient lui coûter au moins deux milliards d'euros jusqu'à juin 2019, soit 0,1 point du PIB (Produit intérieur brut) en plus consacré aux dépenses publiques destinées à aider les Français.
Mais la facture pourrait encore s'alourdir avec la suppression possible de ces taxes, comme l'a laissé entendre Édouard Philippe : "Elles ne s'appliqueront pas avant d’être débattues par toutes les parties prenantes. Il faut mettre en œuvre des mesures d'accompagnement. Si on ne les trouve pas, nous en tirerons les conséquences."
Au gouvernement, personne n'est en mesure de dire comment ces mesures seront financées. "Il faut tenir un discours de vérité aux gilets jaunes", explique-t-on dans l'entourage de Bruno Le Maire. "Soit on fait des économies et ça veut dire que certains vont s'en prendre plein la figure, soit ce sont des dépenses non financées donc du déficit et de la dette en plus." L'équation est donc très compliquée pour l'exécutif qui doit en plus n'a pas encore répondu à la colère qui s'exprime.
Le déficit budgétaire au-delà des 3% ?
Officiellement, le déficit budgétaire doit atteindre 2,8% du PIB 2019, selon les prévisions de Bercy. Avec le report de la taxe carbone, ainsi que les 500 millions d'euros d'aides annoncées mi-novembre pour favoriser la transition écologique, c'est la barre des 3% imposée par l'Union européenne qui pourrait être dépassée. Un mauvais signal pour Bruxelles, alors que le gouvernement avait axé une partie de sa communication sur le respect de ces critères de Maastricht.
Depuis Bruxelles, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a toutefois affirmé que "le cap de la réduction de la dette sera tenu". "On en a discuté avec le président de la République lundi soir. Il y a un cap fixé par le président qui est celui du respect de nos engagements européens, de la réduction de la dépense, de la réduction de la dette et de la réduction des impôts et ce cap là, il sera tenu", a dit le ministre devant des journalistes. À l'heure actuelle, la dette publique atteint 99% du PIB, avec une tendance à la hausse régulière depuis 2010.
Un manque à gagner aussi pour les fournisseurs de gaz et d'électricité
L'État n'est pas le seul à voir ses finances amputées pour l'année 2019. En décidant d'un gel de la hausse des tarifs réglementés du gaz et d'électricité pour l'hiver, les fournisseurs d'énergie comme Engie ou EDF seront aussi touchés par ces mesures d'apaisement à destination des "gilets jaunes".