Il est l’un des jeunes visages de la "Macronie" triomphante auquel il va falloir, peut-être, s’habituer. Aurélien Taché a remis lundi à Gérard Collomb son rapport destiné à améliorer l’intégration des immigrés en France. Il s’agit là du domaine de prédilection du député du Val-d’Oise, âgé de 33 ans, et dont la trajectoire vient de la gauche. Un profil et 72 propositions teintées de social bien utiles pour rééquilibrer la loi asile-immigration du ministre de l’intérieur, dont la dureté est critiquée par les associations. En cela, mais aussi pour sa force de travail, le jeune homme est un rouage indispensable de la majorité.
Fin des études en… troisième. Pourtant, rien ne semblait prédestiné ce natif de Niort à occuper des fonctions au sein du pouvoir. Fils d’un fonctionnaire territorial et d’une mère aide-soignate, l’enfant Aurélien Taché ne se montre pas dans un premier temps doué pour les études. Au point qu’il bifurque en troisième vers l’apprentissage et le métier de plombier. Pour autant, la chose politique ne le désintéresse pas. L’engagement n’est pas absent au sein de sa famille. Son grand-père est communiste, certains de ses oncles socialistes. Lui-même se passionne peu à peu pour la philosophie et la politique, et devient un lecteur fervent.
Retour aux études et premiers engagements à gauche. A 19 ans, peu épanoui par le maniement des joints et des tuyaux, il décide de reprendre des études de droit, grâce à une équivalence. C’est à ce moment-là qu’il embrasse la carrière politique. Il prend sa carte au mouvement des Jeunes socialistes et prend la tête de l’Unef à l’université de Limoges. Il côtoie à Poitiers d'autres jeunes socialistes, dont Sacha Houlié, vice-président de l'Assemblée, Guillaume Chiche, aujourd'hui député ou Stéphane Séjourné, conseiller parlementaire d'Emmanuel Macron.
En 2010, il réussit le concours d’attaché territorial et devient chargé de la politique de lutte contre l’exclusion au conseil régional d’Ile-de-France. Aurélien Taché vient de trouver sa voie : la défense des personnes en situation de précarité. "Venant d’un milieu modeste et ayant galéré pour y arriver, je suis évidemment sensible à ceux qui rencontrent des difficultés pour s’intégrer", confie-t-il au Monde. En 2014, il intègre le ministère du Logement. Auprès de Sylvia Pinel d’abord, d’Emmanuelle Cosse ensuite, il devient conseiller chargé notamment de l’hébergement des sans-abri et de l’accueil des réfugiés.
Rupture avec le PS en 2016. Socialiste depuis plusieurs années, il rend sa carte en 2016, poussé par deux événements : la gestion de l’exécutif des attentats du 13-Novembre - notamment la proposition de déchéance de nationalité-, et l’émergence d’Emmanuel Macron. Aurélien Taché est l’un des premiers à rejoindre En Marche !, le mouvement créé par le ministre de l’Economie d’alors, futur candidat à l’élection présidentielle et futur chef de l’Etat. Bonne pioche, évidemment.
Au sein de La République en marche, il forme notamment avec ses amis de longue date Sacha Houlié, Guillaume Chiche, Stéphane Séjourné, mais aussi Aurore Bergé, porte-parole du groupe LREM à l'Assemblée, une jeune garde fidèle et travailleuse au service du chef de l'Etat.
Défense des plus faibles. Mais en rejoignant le mouvement "et de droite et de gauche", Aurélien Taché ne tire pas un trait sur ses convictions. Les propositions contenues dans son rapport prouvent que les considérations humanistes et la défense des plus faibles restent sa priorité : apprentissage renforcé pour les demandeurs d’asile, possibilité de travailler plus tôt après le dépôt d’un dossier, accès facilité à un logement… autant de mesures à même de contenter l’aile gauche de la majorité, souvent crispée par le projet de loi asile-immigration que présentera Gérard Collomb en Conseil des ministres mercredi. "Quand il parle d’intégration, il sait ce que cela veut dire car il n’a pas eu un parcours linéaire et s’est toujours dépassé pour y arriver", assure Sacha Houlié dans Le Monde.
Que retiendra l'exécutif ? Durant sa campagne, Emmanuel Macron avait promis de faire de la meilleure intégration des réfugiés une priorité. Le gouvernement "reprendra les grands axes" du rapport, a assuré Édouard Philippe, lundi. "La France a une longue et belle tradition d'accueil. Mais notre pays n'est pas toujours à la hauteur de cette tradition." Le Premier ministre a assuré depuis Lyon qu'il réunirait un comité interministériel sur l'intégration "dans les prochaines semaines" pour "étudier les suites à donner au rapport" et "mobiliser les ministres" concernés.