L'interdiction du port de l'abaya à l'école divise sans surprise la Nupes, des élus du PS et du PCF l'approuvant notamment au nom du principe de laïcité, LFI dénonçant une décision islamophobe, et les écologistes une "stigmatisation". A peine sortis de la polémique Medine, et alors que les relations ont été tendues dans l'été sur la question d'une liste commune aux Européennes, les partenaires de l'union de gauche expriment une fois encore leurs désaccords, cette fois sur la laïcité.
"C'est un éternel recommencement, le voile, le burkini, etc. Cela fait rejouer à chaque fois tous les clivages de la gauche", avec "trois lignes": celle dite "printemps républicain" d'une "laïcité fermée", celle d'une laïcité un peu plus ouverte et celle dite "islamo-gauchiste", note le politologue Rémi Lefebvre.
"La police du vêtement"
"Tristesse de voir la rentrée scolaire politiquement polarisée par une nouvelle absurde guerre de religion entièrement artificielle à propos d'un habit féminin", a ainsi réagi lundi le leader Insoumis Jean-Luc Mélenchon, en appelant à "la paix civile" et à "la vraie laïcité qui unit au lieu d'exaspérer". Donnant le ton dimanche soir, la cheffe de file des députés LFI Mathilde Panot avait raillé sur X (ex-Twitter) "l'obsession" du ministre de l'Education Gabriel Attal: "Les musulmans. Plus précisément, les musulmanes".
Dénonçant "la police du vêtement", la députée LFI Clémentine Autain, a jugé cette décision "anticonstitutionnelle, contraire aux principes fondateurs de la laïcité" et "symptomatique du rejet obsessionnel des musulmans".
"Rien à voir avec la religion"
En juin dernier, Jean-Luc Mélenchon avait affirmé que l'abaya n'avait "rien à voir avec la religion", rejoignant le Conseil français du culte musulman, qui avait affirmé que cette longue robe traditionnelle couvrant le corps n'était "pas" un signe religieux musulman. Chez les écologistes, la décision de Gabriel Attal est vue comme "une polémique rance pour détourner l'attention de la politique de démantèlement de l'école publique de Macron", souligne Cyrielle Chatelain, cheffe du groupe à l'Assemblée, dénonçant "une logique d'exclusion et de stigmatisation".
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La députée Sandrine Rousseau, connue pour ses positions féministes, compare cette annonce à un nouveau "contrôle social sur le corps des femmes et des jeunes filles". Les Verts, souvent taxés d'"islamo-gauchistes", "n'ont jamais été pour l'interdiction du voile", rappelle Rémi Lefebvre. Mais la cheffe du parti Marine Tondelier, ou l'ex-candidat à la présidentielle Yannick Jadot, ne se sont pas exprimés, peut-être échaudés par la polémique sur la venue à leurs journées d'été du rappeur controversé Medine.
"Boussole"
Au PS également, le chef du parti Olivier Faure s'est pour l'instant gardé de commenter, tout comme Boris Vallaud, le patron des députés. Parmi les seuls à avoir réagi, le député Jérôme Guedj, activement pro-Nupes, rappelle que "notre boussole, c'est l'interdiction des signes ostensibles à l'école. Dès l'instant où l'abaya ou le qamis (vêtement long masculin, ndlr) sont portés dans une dimension ostentatoire, alors il faut les interdire comme la loi de 2004 le permet, sans difficultés majeures". Un soutien à la décision du ministre guère apprécié par la députée LFI Nadège Abomangoli, qui met en exergue la fragilité de l'alliance de gauche: "Une liste aux européennes avec ça ? Non merci", a-t-elle écrit.
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Le maire PS de Montpellier, Michaël Delafosse, a aussi salué la décision du gouvernement, tout comme la présidente PS d'Occitanie Carole Delga. La droite du parti, hostile à la Nupes, est "logiquement plutôt sur une laïcité fermée", remarque Remi Lefevbre. Pour le politologue, la laïcité est "une question très identitaire chez les milieux militants". Il y a "une frontière générationnelle" et "une crispation autour de la laïcité" dans les partis traditionnels, qui ont des militants plus âgés.
Chez LFI, si les vieux sont "plus laïcards", parmi les jeunes, ainsi que "chez Jean-Luc Mélenchon et ses proches", il y a "par idéologie et par électoralisme, une conception plus souple de la laïcité", ajoute le chercheur. Selon un sondage Ifop après le premier tour de la présidentielle de 2022, les musulmans ont placé très largement Jean-Luc Mélenchon en tête. Réputé pour ses positions parfois à contre-courant au sein de la Nupes, le patron du PCF Fabien Roussel a clairement salué l'interdiction. "Parce que les chefs d'établissement avaient besoin de consignes claires même si ça concerne 150 établissements sur 60.000", a-t-il dit sur Sud Radio.