Attendu jeudi au forum économique de Davos, en Suisse, Manuel Valls est le premier chef de gouvernement socialiste en exercice à se rendre dans ce temple du business et du capitalisme mondial. Mais si le symbole est fort, le Premier ministre pourrait bien se faire voler la vedette par Emmanuel Macron.
Le Leonardo DiCaprio de la finance. CNN, CNBC, Bloomberg TV… le ministre de l'Economie, qui accompagne Manuel Valls, s'apprête à enchaîner trois interviews en deux jours avec les chaines de télévision américaines de la planète business. Sans compter un grand débat diffusé sur BBC world. Si Davos est le Festival de Cannes de la finance, alors Emmanuel Macron en est le Leonardo DiCaprio : tout le monde l'attend, tout le monde veut le voir.
Le petit nouveau contre l'initié. Pour Manuel Valls, la comparaison risque d'être extrêmement violente. D’abord parce que les grands patrons chinois, américains ou japonais ne connaissent pas le Premier ministre français. En revanche, tous ont entendu parler d'Emmanuel Macron. Le patron de Bercy est l'un des leurs. Lui, l'ancien associé-gérant de la banque Rothschild, parle la langue de la finance. Et dans un anglais impeccable, quand Manuel Valls s’exprime en français. En outre, le Premier ministre découvre les lieux, les codes et les usages. A l'inverse, Emmanuel Macron est déjà venu à Davos en 2011, lorsqu'il était le VRP du candidat François Hollande auprès des grandes entreprises et des acteurs de la finance.
Tensions entre Bercy et Matignon. Tout cela risque de ne pas arranger les relations déjà tendues entre Matignon et Bercy. Le ministre de l'Economie s'est récemment fait recadrer plusieurs fois par le chef du gouvernement. Ses sorties polémiques sur les 35 heures ou sur la radicalisation de certains jeunes en banlieue dont la société aurait "une part de responsabilité" ont passablement agacé Manuel Valls. Qui se sentirait également menacé par l'insolente popularité de son ministre.
Incarner le réformisme. Pour Emmanuel Macron, Davos est l'occasion de revenir sur le devant de la scène, poussé par François Hollande. Le ministre organisera ensuite, début février, une grande conférence de presse à Bercy pour présenter la stratégie économique du gouvernement. Il y présentera ses mesures sur les nouvelles opportunités économiques, dites "Noé". Si Emmanuel Macron a subi un revers avec le phagocytage de sa loi "Macron 2" dans les projets de loi portés par d'autres membres du gouvernement, il est bien décidé à incarner le réformisme du quinquennat.
Un duel classique en politique. La politique se nourrit de ces duels. Celui-ci n'est d'ailleurs pas sans rappeler celui entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, quand le premier était à Matignon et le second à l’Intérieur. Si Manuel Valls et Emmanuel Macron n'ont pas encore atteint le niveau de violence du croc de boucher, leur rivalité est aujourd’hui publique. Le remaniement annoncé d'ici la mi-février devrait donner un indice sur le vainqueur. Emmanuel Macron va-t-il devenir, ainsi qu'il le souhaite, le seul maître d'un grand Bercy englobant l’économie et les finances ? La parole est à François Hollande.