Encore un accroc dans la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) : le journaliste militant Taha Bouhafs, soutenu par LFI, a retiré mardi sa candidature aux législatives à Vénissieux (Rhône), dénonçant des "attaques sans précédent", alors que la circonscription est convoitée par le PCF. Les responsables de LFI n'ont eu de cesse ces deux dernières semaines de défendre cette candidature controversée, et confirmée dimanche, dans la 14e circonscription du Rhône où la maire communiste de Vénissieux Michèle Picard veut se présenter.
Taha Bouhafs, 25 ans, a finalement jeté l'éponge dans un communiqué sur Twitter dans la nuit de lundi à mardi. "J'ai sous-estimé la puissance de ce système quand il veut vous broyer", y écrit-il en estimant qu'"aux yeux de beaucoup", il n'a "pas le droit d'exister politiquement". "J'ai été soutenu, pas assez pour tenir, mais assez pour être reconnaissant. (...) Continuez à vous battre. Pour ma part, j'ai essayé mais je n'y arrive plus", conclut-il.
L'ex-candidat LFI à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon a réagi en dénonçant "une meute (qui) s'est acharnée contre lui" avec "menaces de mort et mises en cause publiques quotidiennes". "Je m'en veux de ne pas avoir su le réconforter autant que nécessaire", a-t-il ajouté. Au cœur des critiques qui pleuvaient contre Taha Bouhafs, sa condamnation à l'automne 2021 à 1.500 euros d'amende, notamment pour injure publique pour avoir traité la syndicaliste policière Linda Kebbab d'"arabe de service" - une condamnation dont il a fait appel.
Un "échec collectif"
Son parcours était aussi visé plus largement, de son engagement contre le gouvernement ou l'islamophobie, à sa rigueur de journaliste qui a pu être mise à mal, comme lorsqu'en avril 2018, lors de l'occupation du campus parisien de Tolbiac, il relayait sur Twitter la fausse information de la mort d'un étudiant après une intervention policière. Quelques jours plus tard, le 1er mai 2018, il était le seul à filmer Alexandre Benalla violenter un couple de manifestants place de la Contrescarpe dans la capitale.
Chez LFI, le numéro deux Adrien Quatennens et le député Alexis Corbière ont tous deux mardi fait un "constat d'échec", tandis que la députée Clémentine Autain dénonçait "l'injustice, la violence des attaques venues de l'extrême droite, relayées ad nauseam dans les médias, par la macronie et jusque dans certains rangs à gauche, contre un jeune homme sans diplôme, issu des quartiers populaires et de l'immigration".
C'est en tout cas une nouvelle épine dans le pied de la nouvelle alliance à gauche regroupant LFI, EELV, PS et PCF pour les législatives de juin. Le secrétaire national d'EELV Julien Bayou a déploré "un échec collectif". Quelques jours seulement après un accord aux forceps avec la direction du PS, qui a déclenché l'ire de figures socialistes et de possibles dissidences, c'était lundi au tour du secrétaire national du PCF Fabien Roussel de s'opposer à la candidature de Taha Bouhafs.
"On ne va pas s'en sortir"
Adrien Quatennens a assuré ce mardi que LFI n'avait pas fait pression pour obtenir le retrait de Taha Bouhafs, et qu'il n'aurait "pas un mot contre" les "partenaires" de LFI dans la nouvelle Union populaire. Mais "si les uns et les autres nous nous mettons à analyser et décider pour nos partenaires qui sont leurs candidats, on ne va pas s'en sortir", a-t-il lâché, ciblant le leader des communistes.
Malgré le retrait de Taha Bouhafs, la tension ne retombe pas. Se félicitant que "la raison l'a emporté", Michèle Picard et les communistes de la 14e circonscription sont immédiatement revenus à la charge et appelé dans un communiqué à "maintenant reconnaître" la maire de Vénissieux "comme la candidate qui peut rassembler toute la gauche" face au député LREM sortant Yves Blein.
"Bien évidemment, c'est La France insoumise qui choisira sa candidature sur cette circonscription et personne d'autre", a répondu sèchement dans un tweet Manuel Bompard, le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon. Et Alexis Corbière d'insister : "il y aura un candidat de La France insoumise".