Emmanuel Macron va-t-il réussir à apaiser le climat social, explosif depuis un mois ? C'était l'objectif de son discours, prononcé lundi soir depuis l'Élysée. Pendant treize minutes, le président a répété qu'il prenait la mesure de la colère ambiante, et surtout égrené une série de mesures en faveur du pouvoir d'achat.
À l'arrivée, le chef de l'État a promis une augmentation de salaire de 100 euros mensuels pour les travailleurs au Smic, une annulation de la hausse de CSG pour les retraités ayant entre 1.700 et 2.000 euros de revenus (ceux au-dessous n'étaient déjà pas concernés avant), ainsi que la défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires.
"Le gilet jaune n'est pas prêt d'être raccroché". Sur les ronds-points, l'heure n'est pourtant pas à la satisfaction. "On s'attendait un peu à ce discours vide de sens", regrette au micro d'Europe 1 une "gilet jaune" postée près de Fréjus, qui estime que le chef de l'État n'a lâché que "quelques miettes". "Nous restons sur les ronds-points, nous continuerons les blocages", promet cette manifestante, qui déplore notamment "un discours de seulement treize minutes". Pour Fabienne, une autre manifestante de Brignoles, dans le Var, "il faut aller plus en profondeur". "Demain [mardi], je retourne dans la rue", prévient-elle. "Il y a un pas en avant, mais qui n'est pas du tout suffisant. Le gilet jaune n'est pas prêt d'être raccroché."
"Il a oublié des personnes". Plusieurs auditeurs et lecteurs d'Europe 1 pointent plusieurs manquements dans les annonces du président. "Il a oublié les personnes qui vivent avec moins de 1.000 euros par mois, ceux qui comme moi sont reconnus adulte handicapé", estime Franck sur Facebook. Deux augmentations de l'allocation adulte handicapé sont déjà prévues, l'une déjà en vigueur et l'autre fin 2019, mais aucun coup de pouce supplémentaire n'a été annoncé. Michel, lui, estime être complètement laissé de côté par les solutions avancées par Emmanuel Macron. "Je ne suis pas au Smic, je ne fais pas d'heures supplémentaires, je ne suis pas à la retraite... je m'appelle Lulu l'agent payeur", s'agace-t-il sur les réseaux sociaux. "Sur la fonction publique : rien", peste de son côté Marc. "Sur le système de santé : silence radio. Et [Macron] ne dit pas comment il compensera les trous creusés dans les recettes fiscales et sociales par les sommes distribuées ailleurs. Les primes brandies en pommade ne rentrent pas dans les calculs des retraites."
"On n'a pas gagné". Bernard, 66 ans, retraité du BTP à Saint-Avold en Moselle, est plus indulgent avec la parole présidentielle. "J'en tire une vraie satisfaction", explique-t-il sur Europe 1, même s'il n'était "pas sur le rond-point pour" obtenir un allègement de la CSG mais pensait surtout aux personnes en situation de grande pauvreté. "Il était temps qu'Emmanuel Macron descende de son piédestal. Le discours est potable. Maintenant, on n'a pas gagné, on ne sait pas exactement ce qui va se passer." Car, de fait, le diable se cache dans les modalités d'application.
"Aucune augmentation du Smic pour moi". Prenons l'augmentation de salaire des travailleurs payés au Smic. Celle-ci doit atteindre 100 euros mensuels dès le 1er janvier 2019. Or, l'augmentation prévue (et automatique) du Smic était de 36 euros. Cela fait donc un coup de pouce de 64 euros. Sauf qu'il s'agit en réalité d'une augmentation de la prime d'activité. Or, cette prime dépend notamment des revenus du foyer et de sa composition (nombre d'enfants à charge). Pour Sandrine, le compte n'est pas bon. "Je gagne le Smic", explique-t-elle sur Facebook. "Mais comme on a deux salaires et plus d'enfants à charge, aucune augmentation du Smic pour moi [en dehors de l'augmentation automatique, ndlr] car aucune prime d'activité."