Des phrases qui commencent mais ne finissent pas, des mots qui se télescopent et des prises de paroles pas toujours compréhensibles. Le phrasé trébuchant et précipité de Muriel Pénicaud a régulièrement été moqué lorsqu'elle était ministre du Travail. Invitée mardi de l'émission Ça fait du bien, elle explique que sa diction lui vient de son enfance dans une famille nombreuse, mais également du cancer de la thyroïde qu'elle a eu lorsqu'elle était en poste.
"Il y a deux sujets", annonce Muriel Pénicaud. "Le premier, c'est que dans une famille nombreuse, pour arriver à en placer une, on prend l'habitude de parler vite. En plus, une voix de fille à 10 ans, ça perce moins. Donc j'ai pris la mauvaise habitude de parler très vite pour être sure de placer mon affaire, de pouvoir parler."
"Ça ne m'empêchait absolument pas de faire mon travail"
Et cette mauvaise habitude d'enfant pressée par le temps et les autres aurait perduré à l'âge adulte. "Quand on parle vite, de temps en temps, on trébuche sur un mot ou on ne finit pas sa phrase, parce que l'on est déjà dans la suivante", ajoute-t-elle. "C'est un défaut."
Mais l'ancienne ministre du Travail impute son phrasé compliqué à un autre facteur. "J'ai eu un problème de santé pendant que j'étais ministre, j'ai eu un cancer de la thyroïde qui a perturbé mon langage à un moment donné", confie Muriel Pénicaud. "C'est à ce moment-là que les moqueries sont un peu dures, quand vous n'y pouvez rien."
Une maladie que la ministre d'Edouard Philippe a décidé de taire, jusqu'à en parler pour la première fois publiquement dans son livre Pousser les murs. "J'ai choisi de ne pas le dire à ce moment-là, parce que quand vous êtes en politique, toute vulnérabilité est attaquée, les vraies comme les supposées", analyse Muriel Pénicaud. "Ça ne m'empêchait absolument pas de faire mon travail et je vous ne voulais pas que ça change le regard sur moi."
"Deux lignes sur 350 pages"
C'est très succinctement que l'ancienne ministre parle de son cancer dans son livre. "Deux lignes sur 350 pages", rappelle-t-elle. "Mais, justement, ces deux lignes sont là pour pouvoir dire à tous ceux, malades et qui rament un peu, que c'est difficile quand vous le dites et c'est difficile quand vous ne le dites pas. Qu'il faut que l'on soit plus solidaires, que la société doit progresser et mûrir sur ce sujet."
"Cela me permet de dire à tous ceux et celles, très nombreux, qui ont eu maladie chronique ou un cancer, qui travaillent, et qui n'ont pas envie que l'on change de regard sur eux, qu'avant j'étais solidaire par principe", complète-t-elle. "Maintenant, je suis solidaire du fond des tripes."