À ceux qui pensaient que seul le PS était capable de réunir son bureau sans rien décider, Les Républicains ont apporté, mardi soir, un démenti cinglant. Au terme d'une réunion des plus confuses, les responsables du parti de droite n'ont toujours pas tranché la question de l'exclusion de leurs membres qui ont rallié Emmanuel Macron ou créé le groupe Constructifs à l'Assemblée.
Alors que, dans un premier temps, l'exclusion immédiate de Gérald Darmanin avait été actée, le ministre de l'Action et des Comptes publics a finalement obtenu un sursis de huit jours. Tout comme les autres membres du gouvernement issus de LR (Bruno Le Maire, Edouard Philippe, Sébastien Lecornu) et les Constructifs Franck Riester et Thierry Solère. Tous les six ont une grosse semaine pour venir "s'expliquer" devant une "commission spéciale" de leur parti, avant que l'épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête depuis des mois s'abatte enfin.
Pas d'unanimité. Le report perpétuel de la clarification a de quoi interpeller. "Je ne comprends pas toutes ces hésitations", a d'ailleurs lancé Florence Portelli, en lice pour prendre la tête du parti, après le bureau politique. "Ils nous crachent dessus à longueur de temps, ça ne fera pleurer personne qu'on les mette dehors." Une position ferme défendue par Daniel Fasquelle et Laurent Wauquiez, également candidats à la présidence.
Mais sur le sujet, Les Républicains sont loin de parler d'une même voix. "Si on les exclut aujourd'hui, je me lève et je me casse !" aurait lancé Patrick Ollier pendant le bureau politique, selon Le Figaro. L'ancien député des Hauts-de-Seine est loin d'être seul. "Les purges, je pensais que c'était chez les Staliniens, pas chez les gaullistes", a déclaré Xavier Bertrand, mardi soir, sur France 3. "Je n'ai pas adhéré à un parti pour exclure. Un parti qui se rétrécit, c'est un parti qui n'a pas d'avenir."
Christian Estrosi a, lui aussi, critiqué des méthodes "staliniennes" sur Europe 1 mercredi. Avant de suggérer à demi-mots d'autres sanctions. "Tant qu'à évoquer l'exclusion d'un Premier ministre ou d'un ministre de l'Économie, vous ne pensez pas qu'on devrait mettre aussi à l'ordre du jour tous ceux qui se sont rapprochés dangereusement du FN ? Qui sont restés enfermés dans le "ni-ni" ?", a-t-il lancé. Laurent Wauquiez appréciera.
Une question d'image et de cohérence. C'est bel et bien l'image du parti qui est en jeu, ainsi que son histoire et sa cohérence. Dans un courrier adressé à la direction LR, que Le Figaro s'est procuré, Sébastien Lecornu, secrétaire d'État à la Transition écologique visé par la procédure d'exclusion, l'a rappelé à ceux qui réclament sa tête. Dénonçant "des postures d'exclusion et de rétrécissement", il les a opposées aux attitudes de "Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy" qui "ont toujours cherché à rassembler les Français". "Ne sommes-nous pas les héritiers du gaullisme ?", s'est-il interrogé.
Se pose aussi la question de la limite à partir de laquelle une exclusion se justifie. "À chaque élection, il y a des gens qui se présentent [sur des listes dissidentes]", a fait remarquer Xavier Bertrand mardi soir, alors que l'exclusion de Gérald Darmanin était motivée par une dissidence électorale aux sénatoriales. Par ailleurs, que faire, à l'Assemblée, des députés LR passés chez les Constructifs, en cas d'exclusion des deux fondateurs du groupe, Franck Riester et Thierry Solère ? Alors que le parti espère encore récupérer quelques brebis égarées ou, à tout le moins, garder leur contribution financière…
Calculs politiques. Des considérations politiques ont également pesé dans la balance et peuvent expliquer pourquoi les responsables LR ont si longtemps rechigné à acter la rupture. "Nous avons voulu que cette clarification s'opère après la sénatoriale [sic]", a ainsi expliqué Bernard Accoyer, secrétaire général LR, sur RMC mercredi matin. De fait, le président de la chambre haute sortant, Gérard Larcher, n'avait aucune envie de voir des exclusions brutales perturber sa campagne. Pour s'assurer une réélection dans un fauteuil, lui devait en effet éviter de se couper des centristes. Pas question, donc, que son parti se débarrasse de ses membres les plus modérés.
Avant décembre. Reste que Les Républicains ne vont pas pouvoir repousser indéfiniment l'échéance. Les menaces d'exclusion, traînées depuis le mois de juillet, se muent en aveux de faiblesse à force de ne jamais être mises à exécution. Sans compter que du côté des dissidents, la rupture semble actée. Ni les membres du gouvernement issus des rangs LR, ni les Constructifs ne regrettent leur parti. Les dirigeants de droite auront à cœur de se débarrasser du dossier sensible avant l'élection de leur prochain président, en décembre.