Inconnu du grand public il y a quelques semaines encore, Mounir Mahjoubi, nouveau secrétaire d'Etat en charge du Numérique dans le gouvernement d'Edouard Philippe est loin d'être un geek de la dernière heure. Âgé de 33 ans, il a notamment dirigé le Conseil National du Numérique et fondé plusieurs start-up avant de rejoindre la campagne d'Emmanuel Macron.
Élève brillant et féru d'informatique
Élève brillant, Mounir Mahjoubi, fils d'immigrés marocains, a l’informatique dans la peau. Titulature d'une maîtrise de droit, d'un master d’économie et de finance de Sciences-Po Paris, il a également passé une année à Columbia et fait un détour par Cambridge au cours de ses études. Plus récemment, il a réalisé un CAP de cuisine, sa nouvelle "passion" comme il l'explique lui-même sur son profil LinkedIn. Mounir Mahjoubi se lance aussi très tôt dans la vie professionnelle. Il entre en effet dès 16 ans chez le fournisseur d'accès Club Internet comme technicien réseau. Deux ans plus tard, tout juste majeur, il y est élu délégué du personnel, puis délégué syndical, siégeant au comité d'entreprise européen de la maison mère, Deutsche Telekom.
A sa sortie de SciencesPo en 2009, il crée Mounir & Simeon, une agence d'innovation et de communication et se base notamment sur la toute nouvelle base de données mise en ligne par la mairie de Paris pour créer des cartes électorales dynamiques. Dans le même temps, celui qui a grandi dans le 12ème arrondissement de Paris, fait ses premiers pas en politique. A l'époque encarté au Parti Socialiste (il le quitte en 2015), il travaille notamment sur la campagne de François Hollande pour les primaires de la gauche puis la présidentielle de 2012. Sur le blog de la campagne - depuis supprimé - Mounir Mahjoubi est décrit comme "l’électron libre pour la campagne numérique" et présenté comme le "pilote de la conception et de la réalisation du site web de campagne". Une position qu'il a quelque peu nuancée dans une interview à Rue89 en 2015 : "J’ai soutenu François Hollande, mais toujours en position d’expert. Ma spécialité à moi, c’est le numérique. Et l’engagement des gens grâce au numérique", expliquait-il.
Un CV partagé entre start-up et politique
L'engagement des gens grâce au numérique ou « Internet pour les gens » comme il le dit, c'est effectivement ce qui résume le mieux la vie de ce trentenaire parfaitement bilingue en anglais qui navigue entre les start-up et la politique. En moins de dix ans, il a fondé La Ruche qui dit oui, un réseau d'achat direct de fruits, légume ou encore de viande aux producteurs locaux. Il a également été directeur général adjoint de BETC Digital, une agence de marketing filiale du groupe Havas, et présidé le Conseil National du Numérique. Sans parler des autres start-up qu'il a co-fondées…
Au Conseil National du Numérique (CNNum) il n'a fait qu'un passage éclair. Nommé par François Hollande en février 2016 à la tête de cet organisme composé de trente membre chargés d'aider le gouvernement à comprendre les enjeux du numérique, il a mis fin à la production des rapports jugés trop classiques et mis en place des "notes de vision" d'une quinzaine de pages sur, notamment, l'université en 2020. Il est monté au créneau sur des dossiers comme le chiffrement des communications personnelles, ou le fichier TES. Car pour lui, il ne s'agit pas simplement d'avoir une vision du numérique, mais de s'interroger sur "la vision que l'on a de la société à l'ère du numérique". Au cours de ses onze mois passés au CNNum, il fait également remarquer l'importance du big-data tout en mettant en garde contre ses dérives potentielles et sur le rôle essentiel que doit garder l'humain. Il "faudra plus d'humains pour mieux comprendre cette masse d'information", prévient-il lors d’une conférence sur le big data.
Très impliqué dans la campagne Macron
En janvier, il annonce son départ de la présidence de l’institution pour rejoindre la campagne du candidat d'En Marche!. "Face à tous (les) enjeux" du numérique, il explique alors dans un billet publié sur Medium qu'Emmanuel Macron est "le seul capable de créer les conditions d’une véritable transformation de la France". Durant près de quatre mois, il dirige donc la campagne numérique de l'ancien ministre de l'Economie sur Internet et sur les réseaux sociaux. Au lendemain du second tour, c'est lui qui monte en première ligne pour expliquer les conditions de l'attaque informatique subie par l'équipe de campagne qui a conduit à la publication de près de 9Go de données moins de trois heures avant la fin de la campagne officielle.
Désormais, c'est le programme numérique d'Emmanuel Macron qu'il sera chargé de mettre en place. Tout en menant de front la bataille des législatives. Et sur ce point le jeune homme, en étant candidat dans la seizième circonscription de Paris, ne fait pas dans la facilité. Il se retrouve en effet face à Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, député dans la capitale depuis maintenant vingt ans... Un défi de plus pour ce "social-entrepreneur".