Partiellement confinés en raison de la crise du coronavirus, une partie des Français ont tout de même voté pour le premier tour des élections municipales, dimanche. Se déplaceront-ils dans les bureaux de vote dimanche prochain ? Rien n'est moins sûr, alors que les appels se multiplient de toutes parts pour demander un report du scrutin, marqué par une abstention très forte au premier tour, avec un taux à 54,5%.
Les oppositions demandent un report
À mesure que le bilan de l'épidémie de coronavirus s'alourdit et que les consignes des autorités se durcissent, les appels des responsables politiques à reporter l'élection se multiplient. De Marine Le Pen au Rassemblement national à Yannick Jadot chez Europe Ecologie-Les Verts en passant par le MoDem de François Bayrou, l'écrasante majorité des responsables réclament un report du second tour. Y compris chez Les Républicains, parti dont plusieurs figures de premier plan avaient exigé le maintien du premier tour, jeudi.
Le gouvernement temporise
Au gouvernement, on préfère rester prudent en ne se prononçant pas clairement pour un report, alors que des mesures de confinement plus drastiques pourraient être prises dans la semaine. "Je réunirai en début de semaine le conseil scientifique puis je consulterai les représentants des forces politiques", a simplement affirmé dimanche soir le Premier ministre Edouard Philippe. Mais quand ces "mesures nécessaires" pourraient-elles être prises ? "Mardi, mercredi, sans doute mardi, je serai amené à leur poser la question du deuxième tour", a poursuivi le chef du gouvernement.
Les scientifiques alertent tous azimuts
La décision de reporter l'élection est en tout cas largement plébiscitée au sein du monde scientifique pour limiter les dégâts de cette crise majeure. Pour Rémi Salomon, représentant des médecins de l'AP-HP, la crise sanitaire est telle que "cela doit primer sur tout", a-t-il affirmé dimanche soir sur Europe 1. Le chef du service pédiatrie de l'hôpital Necker "ne peut pas imaginer" que l'on maintienne le second tour des municipales qui doit avoir lieu dimanche prochain. Concevant "très bien" que l'annulation d'une élection, est "très grave", le spécialiste appelle les "responsables politiques à prendre la mesure de la situation".
Les constitutionnalistes se divisent
Après la tenue du premier tour, un report est toutefois devenu complexe, selon les constitutionnalistes. "L'élection municipale est indissociable, elle forme un tout", explique le constitutionnaliste Didier Maus. Il estime que s'il est question d'un report du second tour, il faut annuler le premier : "On refait tout ou rien". Pourtant, il est difficile d'invalider les résultats du premier tour. Pour Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit à l'université de Lille, "selon les principes démocratiques, on ne peut pas remettre en cause une élection qui a eu lieu". Et selon lui, la forte abstention n'y change rien.
Dimanche soir, Marine Le Pen, la présidente du Rassemblement national, a demandé dimanche de "considérer comme acquises" les élections des candidats élus dès le premier tour et de "reporter" les autres scrutins. Est-ce possible ? Conserver les victoires du premier tour et reporter les autres scrutins "serait un cas de figure qu'on a jamais connu", selon le politologue Jean-Yves Camus. Un report du second tour entraînerait l'annulation de l'élection des candidats élus dès le premier tour, avance enfin Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à Paris-1.