Le feuilleton est terminé. La secrétaire d'Etat chargée de la politique de la Ville Myriam El Khomri a été nommée au ministère du Travail à la place de François Rebsamen, démissionnaire, a-t-on appris mercredi auprès de l'Elysée.
Faire baisser le chômage, Son combat… La nouvelle ministre, davantage spécialiste des questions de sécurité que d'emploi, aura pourtant la pesante tâche d'incarner, tous les mois, les nouveaux chiffres du chômage. Et en la matière, l'héritage est lourd : quelque 630.000 chômeurs supplémentaires ont franchi les portes de Pôle emploi depuis l'élection de François Hollande en mai 2012, 200.000 sous l'ère Rebsamen. Et la légère amélioration constatée en juillet (-1.900 inscrits en catégorie A) allège à peine la tâche de la nouvelle ministre. Or, la pression est maximale. Au-delà des enjeux économiques et sociaux, le dossier est éminemment politique : François Hollande a tout simplement annoncé qu'il ne se représenterait pas si l'inversion de la courbe du chômage, promise depuis 2013, ne devenait pas une réalité. Le fardeau est à double tranchant : si la courbe baisse, Myriam El Khomri incarnera la victoire face à l'un des principaux fléaux qui touchent les Français. Sinon, elle pourrait bien être le dernier visage de l'échec de tout un quinquennat.
… face auquel elle sera bien démunie. Or, Myriam El Khomri dispose de bien peu de leviers pour soulever ce fardeau. "Le ministre du Travail est en bout de chaîne, il ne peut pas, à lui seul, endiguer la hausse du chômage. Par contre, il peut lancer un certain nombre de dispositifs pour préparer sa résorption quand l'économie repart", analysait François Rebsamen, mi-août, dans une interview à l'AFP. Le hic : de nombreuses cartes ont déjà été mises sur la table. Pacte de responsabilité, contrats d'avenir, contrat de génération, renforcement du suivi par Pôle emploi, développement de l'alternance, offres de formations gratuites pour les chômeurs longues durées… Le gouvernement a déjà dégainé de nombreux "dispositifs" sous l'ère Rebsamen.
Tout se jouera donc sur la croissance. Si elle atteint 1,5% cette année comme annoncé par le gouvernement, l'objectif devrait être atteint. Si le PIB français se cantonne à une progression de 1,2% comme avancé par l'Insee cet été, Myriam El Khomri devra encore annoncer des mauvaises nouvelles chaque mois.
Réformer le code du Travail, un chantier colossal. Ce pourrait être son chantier le plus laborieux, tant le travail s'annonce titanesque. Myriam El Khomri devra concrétiser la promesse, martelée par Manuel Valls depuis son arrivée à Matignon, de simplifier le code du Travail, dont le nombre d'articles a été multiplié par 10 en quarante ans, passant de 800 à pas moins de 8.000. Le Premier ministre a encore appelé, dimanche dernier à La Rochelle, à "revoir en profondeur la manière même de concevoir notre réglementation" en matière de droit du travail, en défendant le fait de donner "plus de latitude" aux employeurs et aux salariés "pour décider eux-mêmes". Un chantier là encore hautement politique : Myriam El Khomri devra réussir à rendre la réglementation plus souple sans froisser sa gauche, très pointilleuse sur le sujet, notamment sur les questions de temps de travail.
Dialoguer avec les syndicats, jamais de tout repos. Le code du Travail pourrait être abordé les 19 et 20 octobre, lors d'une grande conférence sociale réunissant les partenaires sociaux, et que Myriam El Khomri sera en charge de piloter au côté des deux têtes de l'exécutif. Enfin peut-être : l'ordre du jour n'est pas encore défini. La COP-21 de décembre sur le climat devrait également être abordé. Une seule chose est sûre : celle qui est aussi ministre du "Dialogue social" aura fort à faire avec les partenaires sociaux. Réorientation du pacte de responsabilité, Travail du dimanche, retraites complémentaires… Sur de nombreux sujets, les syndicats maintiennent une pression maximale et devraient multiplier les actions dans les semaines qui viennent.
Faire le service après-vente de François Renbsamen. La nouvelle ministre du Travail devra, enfin, s'assurer de la bonne mise en œuvre des réformes lancées par son prédécesseur. Car la plupart des mesures concoctées par l'ancien ministre entrent à peine en vigueur. Le nouveau dispositif de contrôle des chômeurs sera étendu à toute la France à partir de fin septembre. La loi sur le dialogue social est entrée en vigueur il y a tout juste deux semaines, instaurant notamment une représentativité des salariés dans les TPE. Et le compte personnel de formation, qui permet depuis l'an dernier aux salariés d'économiser des jours de formation financés, peine encore à vraiment décoller. D'où l'importance, pour François Rebsamen, d'avoir bien travaillé sa transition.