C'est presque une surprise depuis la présidentielle et les législatives : le favori d'une élection vient de la remporter. Olivier Faure, candidat à la tête du PS, a obtenu jeudi soir 48,56% des suffrages exprimés. Stéphane Le Foll, arrivé second avec 26,10% des voix, ayant jeté l'éponge, le président du groupe Nouvelle Gauche à l'Assemblée est assuré de prendre la tête de Solférino le 7 avril prochain.
Pur produit de la politique. Peu connu du grand public, Olivier Faure l'est mieux des instances du PS. Et pour cause, il y milite depuis ses 16 ans. Alors qu'il s'apprête aujourd'hui à souffler sa 50e bougie, celui qui a fait ses classes au sein des jeunes rocardiens n'a quasiment jamais connu que la politique. Tout juste a-t-il passé quatre années en tant que cadre dans une PME entre 1993 et 1997. Le reste n'est que compagnonnage d'élus ou mandat. Collaborateur à l'Assemblée nationale dans ses jeunes années, conseiller de Martine Aubry au ministère de l'Emploi pendant trois ans avant d'enchaîner, en 2000, comme directeur adjoint du Premier secrétaire du PS de l'époque, François Hollande. Et s'il n'est finalement devenu député pour la première fois qu'en 2012, cela faisait à l'époque déjà bien quinze ans qu'il avait eu le temps d'arpenter et apprendre par cœur les couloirs de l'Assemblée.
" Notre rassemblement n'est pas une option, il est un impératif. "
"L'unique enfant de Hollande et Aubry". De ces activités auprès des éléphants socialiste, Olivier Faure a tiré un art de la synthèse qui n'a rien à envier à celui de François Hollande. Celui qui avait d'ailleurs l'habitude d'en rire en répétant qu'il était "l'unique enfant de François Hollande et Martine Aubry" espère désormais rassembler. "Notre rassemblement n'est pas une option, il est un impératif", a déclaré le futur nouveau Premier secrétaire, vendredi. "Notre parti est riche de sa diversité. Cette diversité est un atout pour redevenir demain le premier parti de la gauche."
"Opposition intelligente". L'ambition est bien exposée. Les moyens pour y parvenir aussi. Pendant toute sa campagne, Olivier Faure s'est attaché à décrire ce qu'il souhaite incarner : une opposition "intelligente", qui propose des alternatives au libéralisme d'Emmanuel Macron sans tomber dans la radicalité insoumise. "L'opposition a plus de force quand elle n'est pas un réflexe ou un automatisme", expliquait le député de Seine-et-Marne dans Libération à l'automne 2017. "C'est parce que je sais dire "'oui" que mon "non" a du poids." Avec le risque de tomber dans la tiédeur. C'est d'ailleurs ce que Luc Carvounas lui a reproché lors du débat : incarner une "synthèse molle" qui n'a pas convaincu avec Hollande et ne convaincra pas plus après. Faux, a répondu Olivier Faure vendredi. "Je peux être celui qui peut faire dialoguer des forces différentes et non pas les tirer vers la synthèse molle."
Sourire et fermeté. Les reproches n'en tombent pas moins. Sur le fond, mais aussi sur la forme. Trop peu de charisme pour un tel poste, jugent certains, qui doutent de la capacité d'Olivier Faure à s'imposer face aux autres chefs de parti rois des meetings aux ambiances survoltées que sont Jean-Luc Mélenchon, Laurent Wauquiez ou Marine Le Pen. Lors du débat entre les quatre candidats, la semaine dernière, le député de Seine-et-Marne était d'ailleurs apparu bien plus hésitant que ses concurrents. "Il est plus à l'aise dans les débats d'hémicycle", glisse l'un d'eux, Emmanuel Maurel. Pour ses amis, Olivier Faure est simplement droit dans ses bottes. "Il n'a pas besoin de rouler des mécaniques", explique Eduardo Rihan-Cypel au Parisien. L'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault, lui, salue dans L'Obs un député "loyal et sincère", "à l'écoute avec le sourire, mais avec de la fermeté et du caractère."
Apparatchik. Tous lui reconnaissent d'ailleurs d'avoir eu le cran, pendant le quinquennat Hollande, de s'opposer à certaines mesures en proposant des solutions. Ce fut le cas, notamment, sur la déchéance de nationalité et la loi Travail. À chaque fois, il avait présenté un amendement de compromis pour éviter un blocage et s'était heurté à l'inflexion des vallsistes. "Violent", avait-il souligné à l'époque. Mais il en faut plus pour désarçonner cet apparatchik rôdé aux manœuvres politiques. On l'a d'ailleurs souvent soupçonné d'être l'instigateur de certaines d'entre elles.
Chantiers. Louvoyant pour ses détracteurs, Olivier Faure aura désormais fort à faire à la tête du PS. Tout est à reconstruire. Dans Libération il y a cinq mois, le député faisait une liste interminable de chantiers, des nouvelles formes de travail aux institutions en passant par les transports, les inégalités ou encore la transition énergétique. Liste qu'il achevait par quelques mots plein de lucidité : "Les sujets et le boulot ne manquent pas !"