L'affaire du contrôle de police d'Aulnay-sous-Bois qui a viré au cauchemar pour Théo a pris une tournure politique et questionne les rapports de défiance mutuelle entre les jeunes et la police. Pierre Joxe, avocat et ancien ministre de l’Intérieur sous la présidence de François Mitterrand, était l'invité samedi de l'émission C'est arrivé cette semaine. Il apporte son analyse sur cette affaire qui a abouti à la mise en examen des quatre policiers, dont un pour viol.
"Affligé". Pierre Joxe se dit "affligé, d'abord pour la victime blessée gravement, mais aussi affligé pour la police." D'après l'ancien ministre de l'Intérieur, cela fait dix ans que "la police nationale a été la grande abandonnée : diminution des effectifs de police, diminution de l'encadrement, quasi disparition de la formation. Pierre Joxe appuie son propos par des chiffres : "Il y a 10 ans, il y avait 17.500 officiers dans l'ensemble de la police nationale, aujourd'hui, il n'y en a plus que 9.000. Il y avait 2.500 commissaires, aujourd'hui, il n'y en a plus que 1.700." Pour lui, cette baisse vient "d'une politique démagogique menée par Sarkozy. En supprimant des postes d'encadrement, on a permis d'assurer des carrières à un petit nombre de privilégiés."
"Urbanisme criminogène". Il loue en revanche le travail de Bernard Cazeneuve au ministère de l'Intérieur, qui "vient seulement de reconstruire une formation de la police nationale, qui avait été supprimée par Sarkozy et qui n'avait pas été rétablie par Valls." Pour expliquer le climat de défiance, il pointe aussi du doigt "un urbanisme criminogène" dans les banlieues, soit la construction "d'ensembles de plusieurs milliers de logements il y a 30 ans", avec une concentration des "gens les plus pauvres, les moins bien formés, avec le plus grand nombre de chômeurs. On a créé des situations qui engendrent des tensions, en particulier entre ceux qui sont jeunes et qui voudraient autre chose et les plus jeunes policiers qu'on envoie dans les missions les plus difficiles. Quand la police est mal formée et qu'elle commet des abus qui ne sont pas sanctionnés, ça aggrave les tensions."
Des caméras en cas de contrôle. Des caméras mobiles devront désormais être branchées lors de contrôles d'identité, "cela a été décidé il y a quelques jours", précise Pierre Joxe, qui regrette que Manuel Valls, alors Premier ministre, se soit opposé à la délivrance de récépissés en cas de contrôle. "Il a eu gravement tort. Cela donne une garantie au contrôleur comme au contrôlé."