Edouard Philippe était l'invité exceptionnel de Michel Denisot, lundi sur Europe 1. 1:44
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Margaux Lannuzel , modifié à
Invité exceptionnel de Michel Denisot, lundi soir sur Europe 1, l'ex-Premier ministre est revenu sur les recommandations fluctuantes du gouvernement pendant les premiers mois de l'épidémie de coronavirus, regrettant de ne pas avoir "formulé un peu plus de prudence ou de nuance" vis-à-vis de certains avis scientifiques. 
INTERVIEW

C'est une fonction qui consiste à décider, vite et souvent, qu'Edouard Philippe a occupée pendant un peu plus de trois ans. Invité exceptionnel de Michel Denisot, lundi sur Europe 1, l'ancien Premier ministre d'Emmanuel Macron a évoqué un quotidien fait d'arbitrages et "de désaccords" à Matignon. "En général, quand vous avez à prendre une décision, c'est que ça frotte entre le ministre du Budget et le ministre du Travail, entre le privé et la fonction publique… Bref, c'est que ça frotte." Ou que la France est confrontée à une situation inédite, comme la crise du Covid-19

"Des décisions qui sont moins bonnes que d'autres"

Avant d'être remplacé par Jean Castex au début de l'été 2020, Edouard Philippe a en effet dirigé le gouvernement pendant toute la "première vague" épidémique en France, et le confinement mis en place pour la juguler. Or, "quand vous prenez dix, douze ou quinze décisions par jour, vous savez que vous allez vous planter. (…) Il faut accepter l'idée que parfois on prend des décisions qui sont moins bonnes que d'autres", se souvient l'ancien Premier ministre. "En situation de crise, c'est presque mécanique compte tenu du nombre de décisions que vous prenez, et du fait qu'elle sont souvent fondées sur des informations incomplètes, erronées ou contradictoires." 

De cette période, l'ex-chef du gouvernement "regrette" une chose en particulier, le fait de ne pas avoir "formulé un peu plus de prudence ou de nuance dans un certain nombre d'avis qu'[il] répétait". Mais, se défend-il, ces avis "étaient formulés sans nuance par ceux qui les formulaient". "Quand on a repris la doctrine de l'Organisation mondiale de la Santé sur le port du masque, c'est parce que c'était l'Organisation mondiale de la Santé, c'est elle qui a l'expertise sur la gestion des pandémies !"

"L'OMS nous a dit, jusqu'au mois de juin 2020, que le port du masque en population générale n'avait pas de sens", poursuit Edouard Philippe. "Je l'ai répété avec beaucoup d'assurance. Mais c'est vrai que maintenant, je me dis que si j'avais mis un peu de nuance là dedans, j'aurais l'air moins… Bon. Sauf qu'en même temps, quand vous formulez un message de Santé publique avec des nuances, on peut vous faire le reproche, et je le comprendrais, de ne pas être suffisamment ferme, ne pas être suffisamment précis."

"Le 'quoi qu'il en coûte' était justifié"

Evoquant cette fois la gestion économique de la crise sanitaire, Edouard Philippe n'a, en revanche, aucun regret quant aux sommes dépensées pour financer, notamment, l'activité partielle. "Je pense que le 'quoi qu'il en coûte' était justifié et qu'il fallait, face à cette crise sanitaire, dépenser ce qui était nécessaire pour permettre au maximum de gens de passer un cap redoutablement difficile", martèle-t-il.

"Mais, ma deuxième conviction est que ce 'quoi qu'il en coûte' va avoir un coût à un moment, et je ne sais pas dire à quel moment", estime toutefois l'ancien chef du gouvernement, pour qui il faudra alors "se fixer un chemin de maîtrise de la dépense qui dure 10 à 15 ans et qui soit rigoureusement respecté". "Cela veut dire probablement dépenser moins, faire des réformes dont on sait qu'elles ne sont pas populaires, dont on sait qu'elles ne sont pas attendues, mais qui sont indispensables."