Des propos qui ne passent pas. Emmanuel Macron a déclaré mercredi, à l’occasion de son déplacement en Algérie, que la colonisation française avait été "un crime contre l’humanité", s’attirant les foudres de la droite et de l’extrême droite. Des propos "indignes d’un candidat à la présidence de la République", a notamment dénoncé François Fillon lors de son meeting à Compiègne.
Une histoire entre ombres et lumières. "Je pense qu’il faut être réaliste et regarder l’histoire. Soixante ans après la décolonisation, je ne vois pas l’utilité de glorifier, par exemple, le système colonial, ou de poursuivre indéfiniment les polémiques autour de ce passé", estime pour sa part, au micro d’Europe Midi, l’historien Benjamin Stora, spécialiste de la guerre d'Algérie. Le chercheur appelle notamment à avoir "un regard serein sur ce qu’a été l’histoire de France, dans ses lumières et aussi dans ses zones d’ombres. L’histoire de France ne peut pas être examinée comme un bloc".
Se tourner vers l'avenir. Face à l’indignation d’une partie de la classe politique, le spécialiste veut dénoncer "un tabou français" sur ces questions coloniales, "mais pas dans la jeunesse française, parce que dans la jeunesse française, la condamnation de la colonisation et de l’esclavage est un fait évident". "Il y a un décalage, poursuit Benjamin Stora, entre ce que pense la jeunesse d’aujourd’hui, toutes catégories sociales confondues, et ce que pense la vieille classe politique qui s’accroche encore à défendre une certaine identité de la France." "Si on reste englué dans une glorification du passé de la France, on avancera pas", ajoute-t-il.
Le modèle colonial. "En même temps, avait également nuancé Emmanuel Macron lors de son entretien mercredi sur la chaîne algérienne Echourouk News, il ne faut pas balayer tout ce passé. Et je ne regrette pas cela parce qu’il y a une jolie formule qui vaut pour l’Algérie : la France a installé les droits de l’homme en Algérie. Simplement elle a oublié de les lire."
"Depuis bien longtemps on peut démontrer qu’il y avait un faux modèle de la République dans les colonies", renchérit Benjamin Stora. "C’était un modèle où la République était proclamée : Liberté, égalité, fraternité, mais malheureusement peu mis en pratique au regard de ce que l’on appelait ‘les populations indigènes’. C’est de là que sont nées les insurrections, les mouvement nationalistes et les indépendances politiques qui ont été massives dans les années 1960, notamment sous le général De Gaulle".