Élisabeth Borne a jugé mercredi "inconstitutionnelle" la proposition de loi portée par le groupe parlementaire indépendant Liot visant à abroger la réforme des retraites, à l'issue d'une rencontre avec les syndicats à Matignon. "Il est assez irresponsable de la part d'un groupe parlementaire de laisser croire qu'on peut présenter une proposition de loi qui supprime 18 milliards (d'euros) de ressources et que cette proposition de loi pourrait prospérer", a affirmé la Première ministre.
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"Il y a des règles sur les propositions de loi qu'on peut présenter : (...) c'est de ne pas alourdir les dépenses et de ne pas réduire les recettes", a-t-elle fait valoir, semblant rejoindre le souhait des groupes de la majorité (Renaissance, MoDem, Horizons) de recourir à l'article 40 de la Constitution qui permet de soulever l'irrecevabilité financière du texte.
"Quelque part un miroir aux alouettes"
"C'est quelque part un miroir aux alouettes. On fait croire aux salariés qu'ils auraient une possibilité de débouché", a-t-elle estimé. "Cette proposition d'abrogation est inconstitutionnelle. Je pense qu'il faut chacun en soit conscient et que chacun prenne ses responsabilités en conséquence", a ajouté la cheffe du gouvernement. Les syndicats, reçus mardi et mercredi à Matignon, ont redit leur soutien à la proposition de Liot, qui doit être examinée à l'Assemblée nationale le 8 juin, deux jours après une 14e journée de grèves et de manifestations contre la réforme des retraites.
Empêcher l'examen du texte de Liot "serait inacceptable", a affirmé mardi soir le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, tandis que Sophie Binet pour la CGT a jugé mercredi sur France Inter qu'il serait "gravissime que les députés soient encore une fois empêchés de voter sur cette réforme". L'article 40 de la Constitution dispose que les propositions et amendements des parlementaires ne sont pas recevables s'ils entraînent une diminution des recettes ou un alourdissement des charges publiques.
Coquerel devra statuer sur la recevabilité du texte
La majorité demande ainsi au président de la commission des Finances, Eric Coquerel (LFI), de statuer sur la recevabilité du texte. Le rapporteur général du budget, Jean-René Cazeneuve (Renaissance), va également être sollicité. Et "s'il y a conflit entre eux", une réunion du bureau de l'Assemblée, plus haute instance collégiale, tranchera, a avancé la patronne des députés Renaissance, Aurore Bergé.
Le président Emmanuel Macron s'était pourtant montré ouvert au débat sur le texte: le 8 juin, "pour la majorité, ce sera l'occasion de continuer à expliquer notre projet", a-t-il dit dimanche. Et "chacun devra prendre ses responsabilités et expliquer comment on finance", a-t-il tancé.