Le Sénat à majorité de droite va entrer dans le dur de la réforme des retraites, avec un débat attendu sur l'extinction des régimes spéciaux. Le bras de fer social se tend déjà : une grève reconductible a débuté vendredi après-midi dans la filière énergie. Le mouvement chez les électriciens et gaziers a démarré avec des baisses de production d'électricité dans plusieurs centrales nucléaires, "compte tenu du débat qui s'ouvre au Sénat", a annoncé la CGT.
Rejet d'une demande de référendum portée par la gauche
Dans l'hémicycle, après le rejet dans la matinée d'une demande de référendum portée par la gauche, les discussions ont repris à 17 heures avec plusieurs interventions de sénateurs communistes demandant au gouvernement de rendre public l'avis du Conseil d'Etat sur la réforme. Les sénateurs attaquent ensuite l'examen des articles et poursuivront les débats tout le weekend. Ils ont débuté par l'article liminaire sur les prévisions de déficit. Puis, viendra l'article premier sur la disparition progressive des régimes spéciaux de la RATP, des industries électriques et gazières (IEG), de la Banque de France ou des clercs et employés de notaire. Le projet du gouvernement prévoit leur suppression seulement pour les futurs embauchés.
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Le chef des sénateurs LR, Bruno Retailleau souhaite, lui, la disparition de "la clause du grand-père", c'est-à-dire que les régimes spéciaux soient aussi supprimés pour les salariés actuels. Le sénateur vendéen, qui a promis de voter le texte "mais une réforme modifiée", a déposé un amendement en ce sens. Ce dernier ne sera pas examiné avant le débat sur l'article 7 de la réforme : la mesure-phare du texte qui concerne le report de l'âge légal de départ à 64 ans.
Jusqu'au 12 mars pour achever la première lecture des 20 articles
"Je ne vois pas au nom de quoi on exonérerait une partie des Français d'un effort particulier que tous les Français vont faire. Est-ce qu'une infirmière n'a pas un travail au moins aussi fatigant que quelqu'un qui conduit un train ?", argumente-t-il devant la presse. "Mon amendement propose une convergence (entre les régimes, NDLR) jusqu'en 2040, il n'y a rien de brutal alors que pour tous les Français, à partir du 1er septembre, la réforme commencera progressivement à s'appliquer", insiste-t-il. Le gouvernement s'y oppose et l'amendement Retailleau pourrait être rejeté, faute de soutien des centristes.
Le Sénat a jusqu'au 12 mars à minuit pour tenter d'achever la première lecture des 20 articles du texte et les près de 4.000 amendements. Avec dans toutes les têtes le 7 mars, grande journée de mobilisation contre la réforme, durant laquelle l'intersyndicale appelle à mettre la France "à l'arrêt". De source policière, les services de renseignements attendent entre 1,1 et 1,4 million de manifestants en France mardi dont 60.000 à 90.000 à Paris. Dans la capitale, le cortège défilera de Sèvres-Babylone à Place d'Italie. 320 rassemblements sont prévus dans toute la France, d'après une autre source policière.
D'importantes perturbations à prévoir dans les transports
Signe des importantes perturbations à prévoir, le ministre des Transports Clément Beaune a appelé vendredi tous les Français qui le peuvent à télétravailler. L'opérateur des transports franciliens Ile-de-France Mobilités a annoncé offrir le covoiturage aux passagers inscrits sur certaines plateformes. À la veille de cette grève, la Première ministre Elisabeth Borne interviendra sur France 5 dans l'émission "C à vous". Vendredi matin, les sénateurs ont sans surprise largement rejeté, par 251 voix contre 93, une demande de référendum portée par la gauche, une procédure rare au Sénat, où la dernière motion référendaire remontait à 2014.
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"Le bon sens, c'est retirer cette réforme, à défaut d'avoir le courage de la présenter devant les Français", a estimé le chef des sénateurs PS Patrick Kanner. En réponse, le ministre du Travail Olivier Dussopt a défendu la "légitimité" de la "démocratie représentative et du Parlement. Auparavant, la communiste Laurence Cohen avait dénoncé un "coup de force institutionnel". La rapporteure générale Elisabeth Doineau (centriste) a critiqué cette demande "binaire" de référendum : "évidemment demandez des efforts aux Français, ils vont répondre non. Mais si on leur dit, +voulez-vous sauver le système par répartition+, ils vous diront oui".