L'Assemblée nationale se penche mardi sur la stratégie française d'aide à l'Ukraine, lors d'un débat suivi d'un vote symbolique, qui va surtout servir de confrontation entre la majorité, le Rassemblement national et La France insoumise, cela à trois mois des élections européennes.
Emmanuel Macron "endosse des habits de chef de guerre"
"Pour le RN, face à la Russie, toutes les mollesses, toutes les faiblesses sont bonnes", avait lancé le Premier ministre Gabriel Attal samedi lors d'un meeting à Lille, donnant ainsi le ton probable au Palais-Bourbon mardi. Les oppositions ont condamné à plusieurs reprises les récentes sorties du président Macron, qui n'exclut pas l'envoi de troupes au sol en Ukraine et ne veut "aucune limite" dans le soutien à Kiev. Une posture "inquiétante" pour Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français (PCF), invité du Grand Rendez-vous Europe 1/CNews/Les Échos.
"Je pense qu'il fait des coups de menton avec un langage guerrier, mais que lui-même ne croit pas un seul instant que la France va s'engager là-dedans", a-t-il glissé.
Emmanuel Macron cherche-t-il à instrumentaliser la guerre en Ukraine à des fins de politique intérieure ? Oui, d'après le secrétaire national du PCF. "Il agite un contrefeu, une manière de détourner l'attention des Français sur ce conflit et pendant ce temps-là, c'est la catastrophe en France. La situation sociale est déplorable, le pouvoir d'achat des Français fond comme neige au soleil et il n'y a aucune réponse qui est apportée, que ce soit pour les agriculteurs, pour les salariés, pour nos services publics. C'est une manière pour lui d'endosser des habits de chef de guerre tout en menant une guerre sociale qui fait beaucoup de mal à notre pays", a assuré Fabien Roussel.
"La France n'a pas besoin d'un George Bush à la française"
"J'ai le sentiment qu'il se prend pour le chef d'État américain Bush en 2003. Nous n'avons pas besoin en France d'un Bush. Nous n'avons pas besoin en France d'un chef militaire, nous avons besoin d'une coalition pour la paix, et de ramener la paix en Europe", a-t-il tranché.
Concernant l'accord de sécurité franco-ukrainien du 16 février examiné mardi à l'Assemblée, Fabien Roussel l'assure, "si le discours du Premier ministre reprend les éléments qu'il y a dans le traité que Monsieur Macron a signé avec Volodymyr Zelensky, nous voterons contre".
"Ce traité dit plusieurs choses. Il dit notamment que l'Ukraine doit rentrer dans l'OTAN. C'est une provocation, c'est une bêtise. Et d'ailleurs l'Ukraine ne rentrera jamais dans l'OTAN parce que ça fera partie des discussions. L'autre chose, c'est qu'il est écrit dedans 'un soutien militaire sans limite' [...] aujourd'hui, nous franchissons un cap dangereux pour l'avenir de l'Europe et pour la paix en Europe et nous ne voulons pas franchir ce cap. Pour nous, parti de la paix, c'est comme si on assassinait une deuxième fois Jean Jaurès. Nous sommes à l'aube d'une escalade militaire dangereuse", a assuré le député du Nord.
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L'accord franco-ukrainien, conclu pour une durée de dix ans, comprend un renforcement de la coopération militaire, en particulier dans les domaines de l'artillerie et de la défense aérienne. En 2024, Paris promet de fournir "jusqu'à 3 milliards d'euros de soutien supplémentaire", un financement que pourraient interroger les oppositions alors que le gouvernement vient d'annoncer une série de coupes budgétaires.
Invité du Grand Rendez-vous Europe 1/CNews/Les Échos ce dimanche, Fabien Roussel indique que le Parti communiste français prendra certainement une initiative mardi, celle d'appeler l'ensemble des concitoyens à se mobiliser et à exprimer le rejet d'aller plus loin dans la guerre. "Et pourquoi pas nous rassembler partout en France devant les monuments aux morts, de venir faire une veillée. Nous serons ce que nous serons, mais nous devons faire briller les bougies de la paix, dire stop à la guerre et faire en sorte que l'on pousse et que l'on mette la pression sur le président de la République", a-t-il conclu. Après l'Assemblée, un débat similaire se tiendra au Sénat mercredi.