L'unité nationale est déjà compliquée à obtenir de la part de tous les partis politiques après un attentat. Cette semaine, preuve est faite avec la droite que même l'unité au sein d'un même camp n'est pas toujours évidente. Au fil des jours ayant suivi les attaques terroristes de l'Aude, des divergences sont apparues à droite, certains responsables Républicains ne souscrivant pas aux propos de leur chef, Laurent Wauquiez.
Wauquiez constant depuis des années. Il faut dire que le président LR n'y était pas allé avec le dos de la cuillère lundi, après avoir observé deux jours et demi de silence. Lors d'une déclaration à la presse, il avait fustigé la "coupable naïveté" d'Emmanuel Macron et demandé le rétablissement de l'état d'urgence. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a également exigé le placement en rétention des fichés S pour radicalisation disposant de la nationalité française, et l'expulsion des étrangers dans la même situation. Rien de surprenant de la part de Laurent Wauquiez, resté très constant sur le sujet depuis plusieurs années.
La "chimère du retour de l'état d'urgence". Mais à droite, cette ligne dure ne fait pas l'unanimité. "Je ne crois pas à la chimère du retour de l'état d'urgence", a ainsi réagi la présidente d'Île-de-France, Valérie Pécresse, jeudi, sur FranceInfo. "L'état d'urgence est un état d'exception, provisoire et temporaire. Or, la guerre que nous menons contre le terrorisme islamiste est une guerre dans la durée." C'est exactement pour la même raison que la tenante d'une ligne plus modérée que Laurent Wauquiez n'est "pas favorable à ce qu'on mette en rétention administrative les fichés S radicalisés". "Le problème d'une rétention, c'est que ce n'est pas durable", a-t-elle expliqué. "On ne va pas créer un Guantanamo à la française, on ne va pas, pendant des années, laisser des gens sans procès enfermés. Il faut bien les faire passer par la case justice. Donc il faut muscler notre État de droit."
Interrogée sur ses divergences avec Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse a botté en touche. Non sans expliquer que "face à cette guerre [contre le terrorisme], les solutions que nous devons avoir doivent être à la fois crédibles et efficaces". Ce qui revient à dire, en creux, que celles avancées par Laurent Wauquiez ne répondent pas à ces deux critères.
" La rétention des fichés S est très difficile à mettre en œuvre. Très difficile techniquement, très difficile juridiquement. "
"Wauquiez s'est exprimé sans rendre de compte à qui que ce soit". L'ancien ministre de la Défense de Nicolas Sarkozy, Gérard Longuet, est quant à lui allé encore plus loin, jeudi, sur Public Sénat. "Laurent Wauquiez a fait un choix, c'est d'être l'opposant officiel du président de la République. Il s'est exprimé sans avoir réuni son bureau politique et sans rendre compte à qui que ce soit." Le sénateur LR de la Meuse a également pointé les "problèmes juridiques majeurs" posés par la rétention administrative des fichés S.
Lundi, sur Europe 1, Frédéric Péchenard, vice-président LR de la région Île-de-France et ancien directeur général de la police nationale, ne disait pas autre chose. "Je ne pense pas que ça ait beaucoup de sens dans la mesure où, c'est l'ancien policier qui parle, c'est très difficile à mettre en œuvre. Très difficile techniquement, très difficile juridiquement."
Malaise à l'Assemblée. À l'Assemblée aussi, certains députés seraient gênés aux entournures par les coups de boutoir du chef du parti. "Laurent Wauquiez met une pression assez folle sur le groupe LR", assure un parlementaire issu de la majorité. "Et comme certains pensent déjà aux investitures dans 4 ans et demi…" Le fait qu'une partie seulement des députés LR se soit levée, mardi, lors de la standing-ovation réservée à Jean-Luc Mélenchon, qui s'était fait le chantre de l'union nationale en hommage au colonel de gendarmerie décédé Arnaud Beltrame, n'est pas passé inaperçu. "J'ai l'impression qu'il y a un certain malaise chez ceux qui ne sont pas d'accord avec Christian Jacob et Laurent Wauquiez", poursuit le même parlementaire.