Les députés communistes ont estimé mardi que le chef de l'Etat avait provoqué "beaucoup de frustration" en s'appropriant "la joie du peuple" liée à la victoire des Bleus, regrettant aussi la vitesse avec laquelle le car des footballeurs a défilé lundi sur les Champs-Elysées.
Emmanuel Macron "avait l'air pressé de les retrouver". "Il semble qu'il y ait eu beaucoup de frustration que le président de la République s'approprie presque de manière exclusive et irrationnelle la joie qui est celle du peuple de France", a observé l'un de leurs porte-parole, Sébastien Jumel, lors d'un point de presse.
Le chef de l'Etat "avait l'air pressé de les retrouver" et "entre un bus qui fend la foule pendant quatre heures en 1998 et des supporters qui attendent quatre/cinq heures en plein cagnard et qui voient les footballeurs dix secondes, je pense qu'on pouvait trouver un équilibre", a ajouté ce député de Seine-Maritime.
Emmanuel Macron "se prend pour le capitaine de l'équipe de France alors qu'il n'a pas beaucoup joué", a aussi affirmé Sébastien Jumel, ajoutant être "très heureux" de la victoire des Bleus face à la Croatie, deuxième Coupe du monde de football remportée par la France, vingt ans après celle de 1998.
Des critiques également de la part d'un député LR. "On peut être en joie et continuer à combattre les choix politiques" du gouvernement, a observé à ses côtés Elsa Faucillon, également porte-parole des élus PCF. Un peu plus tard, dans les couloirs de l'Assemblée, Fabien Di Filippo (LR) a formulé des critiques similaires, déplorant le peu de "temps passé sur les Champs-Elysées" où le public n'a vu les joueurs qu'"une douzaine de petites minutes" quand "dans le confort douillet de l'Elysée", il y a eu "deux, trois heures de célébration".
"Une Coupe du monde, c'est une liesse populaire et cette célébration, elle doit se faire avec le peuple (...) et à côté de ça, on a fait accélérer le bus pour qu'ils soient le moins en retard possible à la réception à l'Elysée", a-t-il dénoncé, évoquant la déception de familles et enfants qui "ont traversé la France parfois, attendu des heures entière dans la chaleur pour voir leurs idoles".
"Le petit peuple n'a pas le droit de voir l'équipe qui vient de triompher en son nom devant la planète toute entière", a lancé lundi soir dans l'hémicycle de l'Assemblée Jean Lassalle, jugeant que "M. Macron a voulu les accaparer à l'Elysée".
Edouard Philippe ne voit "rien de pire" que la récupération politique
"Il n'y a rien de pire que d'essayer de faire en sorte que des sportifs ou une équipe démontrent des idées qui seraient les vôtres. Il n'y a rien de pire que (...) de placer dans la parole des sportifs ce qu'on aimerait dire soi-même", a déclaré Edouard Philippe lors de la séance de questions au gouvernement.
Des "footballeurs qui ont fait honneur à leur pays". "C'est la raison pour laquelle je vais faire l'inverse et je vais formuler ce que j'ai entendu de ces footballeurs qui ont fait honneur à leur pays et qu'ils ont dit très tôt dans la compétition, avec une immense fierté : Vive la République et vive la France", a ajouté le Premier ministre.
Edouard Philippe répondait à une interpellation du député (LFI) Ugo Bernalicis, désireux que "cette victoire profite à tous et qu'elle ruisselle sur la sphère amateur". "D'ailleurs pour le sport en général, nous constatons la baisse des subventions publiques et la suppression des contrats aidés qui appuyaient utilement le bénévolat", avait déploré l'élu du Nord.
"Un système qui fait émerger l'excellence et qui l'assume." "Vous avez essayé de nourrir un propos de politique générale à partir de ce succès. Au fond, vous nous dites que si cette équipe est championne du monde, c'est en dépit de notre politique", a raillé le Premier ministre en retour. "Je voudrais dire que si nous devons nous réjouir, c'est au fond, probablement parce que ce qui a gagné, dimanche à Moscou, c'est un système qui fait émerger l'excellence et qui l'assume", a-t-il relevé.
"C'est un système qui est fondé sur un travail d'équipe et qui l'assume, c'est un système qui repose sur des prises de responsabilité (...), c'est un système qui repose sur une passion, une passion française pour le football", a-t-il poursuivi en ironisant au passage sur ceux qui "l'ont découvert plus récemment", en allusion au chef de file des Insoumis Jean-Luc Mélenchon.
Cette intervention avait été précédée par une ovation debout de l'ensemble de l'hémicycle pour saluer ce titre de champion du monde, le président de l'Assemblée François de Rugy (LREM) saluant une nouvelle fois "ce moment d'unité nationale".