Ils entrent dans l'arène dès vendredi matin. Les médecins libéraux sont appelés à entamer une grève des urgences et des gardes, à deux jours d'une manifestation dimanche à Paris pour demander le retrait du projet de loi de Marisol Touraine.
Face à la "surdité" de la ministre de la Santé, "nous avons décidé de durcir notre mouvement", a scandé jeudi lors d'une conférence de presse Eric Henry, l'un des porte-parole du "Mouvement pour la santé de tous".
Une journée "santé morte". Ce collectif, créé en février pour demander le retrait du projet de loi, réunit une quarantaine de syndicats et d'organisations étudiantes du monde de la santé. Il avait déjà appelé les médecins, kinésithérapeutes, dentistes, infirmiers et autres professionnels à fermer leurs cabinets samedi pour une journée "santé morte". Il invite désormais les médecins libéraux à observer une grève des gardes et des urgences dès vendredi 8h et jusqu'à lundi 8h. "L'Etat français va devoir se débrouiller avec le système hospitalier. Ca va engorger les urgences et montrer que, sans les libéraux, notre système de santé ne fonctionne pas", a prévenu Eric Henry. Les pouvoirs publics pourront toutefois réquisitionner des professionnels si la grève est très suivie.
Le tiers payant au centre du conflit. Le durcissement a été acté après l'annonce lundi par Marisol Touraine que le tiers payant serait bien généralisé d'ici 2017. Ce dispositif, prévu par la loi Santé et concocté par la ministre, vise à dispenser le patient d'avancer les frais remboursables lors d'une consultation. Il ne versera plus d'argent de sa poche, et les médecins se feront directement payer par la Sécurité sociale et les mutuelles. Le but : que les patients les plus précaires puissent se soigner même s'ils n'ont pas l'argent pour avancer les frais. Tous les pays de l'Union européenne ont adopté un tel dispositif, à part la Belgique et le Luxembourg.
Mais les médecins craignent que cela n'engendre des démarches administratives insurmontables pour qu'ils se fassent payer auprès des mutuelles santé. "C'est un asservissement financier", a dénoncé Didier Legeais, vice-président de l'Union des chirurgiens de France (UCDF). En outre, ils redoutent une inflation des consultations, entraînée par une "déresponsabilisation du patient". Selon un sondage OpinionWay publié le 19 septembre, 95% des médecins y seraient opposés.
Les libéraux opposés aux Maison de santé. Le mouvement dit également avoir vécu comme une "provocation" supplémentaire le déplacement mardi de la ministre avec le Premier ministre Manuel Valls dans une "Maison de santé", structure qui réunit plusieurs professionnels engagés par contrat avec l'agence régionale de santé (ARS). "Une Maison de santé, c'est un village Potemkine. Quand verra-t-on la ministre dans les cabinets des libéraux?", a tempêté Catherine Mojaïsky de la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD). "Son schéma pour réformer la médecine de ville n'est pas le bon, c'est celui du modèle hospitalier. C'est un schéma administratif, hiérarchique, autoritaire", a ajouté Philippe Tisserand, de la Fédération nationale des infirmiers (FNI).
Généralistes, chirurgiens, internes, mais aussi infirmiers ou kinésithérapeutes : dimanche, c'est tout le monde médical qui défilera en rangs serrés contre le projet de loi.
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