Dix jours après les attentats, certains ne trouvent toujours pas le sommeil. Comme le racontait Le Parisien ce weekend, les ventes de somnifères décollent. Certains, même, redoutent le sommeil, de peur de sombrer encore dans de multiples cauchemars. Comment retrouver un sommeil apaisé ? "Ce n’est vraiment pas simple", prévient d’emblée François Duforez, médecin du sommeil et praticien attaché à l'Hôtel-Dieu, contacté par Europe 1. Mais il existe tout de même quelques techniques pour lutter contre les troubles. Voici nos conseils.
POUR LES INSOMNIES
Déconnecter, "faire diversion". Le premier conseil qui fait l’unanimité, c’est celui de contrôler son rapport à l’information. Il faut absolument éviter de rester rivé en continu sur les journaux, le web ou la TV. "Les informations auto-entretiennent un état émotionnel aigue, un état de vigilance, surtout pour les profils déjà anxieux", explique François Duforez. Environ 1h30 avant de se coucher, il faut donc se forcer à passer à une autre registre : se regarder un film, lire un bouquin, discuter de choses qui n’ont pas de rapport avec les attentats. "Il est très important de ne pas se complaire dans la remémoration des images. Il ne faut pas tout le temps repenser aux scènes, regarder des vidéos. C’est anti-thérapeutique. Il faut mettre de plus en plus de distance. Ne pas laisser le cerveau s’imprégner des images", poursuit le Dr Sylvie Royant-Parola, psychiatre spécialiste des troubles du sommeil, présidente du Réseau Morphée.
La journée, les experts conseillent de garder une activité la plus normale possible. Il est également conseillé de faire du sport, d’avoir une activité physique, de cardio-training : le jogging, le vélo etc., c’est à direquelque chose de plus intense qu’une marche rapide. Enfin, il est important de se prendre un moment pour discuter de ce qu’il se passe, en famille ou au travail. "N’hésitez pas à partir en weekend, à multiplier les moments de détentes. Tout ce qui fait diversion est important", insiste Sylvie Royant-Parola.
Ne pas forcément se coucher plus tôt. L’heure du couché a aussi son importance. Se coucher plus tôt que d’habitude ne sert à rien si l’on reste à regarder le plafond dans son lit. Pour Sylvie Royant-Parola, "il est conseillé de se coucher à l’heure habituelle, voire un peu plus tard, après une longue activité de détente. Et le matin, n’essayez pas non plus de rattraper vos heures de sommeil. Levez-vous à des heures régulières. Si vous vous levez trop tard, la nuit d’après sera pire".
Ne pas faire d’automédication, attention à l’alcool. Si vraiment vous ne parvenez pas à lutter contre les insomnies, vous pouvez aussi prendre certaines plantes, comme la Valériane, disponible en pharmacie. Mais avant de prendre des psychotropes, des sédatifs ou des anxiolytiques, n’hésitez pas à aller consulter. Allez chez votre médecin traitant ou un généraliste, qui pourra vous faire des prescriptions encadrées. "Il ne faut pas non plus abuser de l’alcool", ajoute le Dr Royant Parola. Avant d’expliquer : "si cela reste modéré, il n’y a pas de soucis. Mais il est important de ne pas être dans un dosage qui vous entraîne à la limite de la perte de contrôle. L’alcool peut vous calmer, dans un premier temps. Mais il diminue les barrières psychiques. Et cela provoque un risque de se réveiller dans la nuit. Et à ce moment-là, vous êtes encore plus vulnérable".
POUR LES CAUCHEMARS
Imaginez de nouvelles scènes. Si vos cauchemars persistent malgré vos efforts pour déconnecter, forcez-vous à ne pas vous les repasser en boucle. Allez même plus loin : essayer de les repenser autrement, faîtes un travail d’imagination. "Imaginez comment la scène aurait pu se passer autrement, comment elle aurait pu se dérouler de manière positive. Au lieu d’hommes qui vous ont agressé, par exemple, imaginez une autre scène où ces hommes viennent seulement vous parler, sans violence. Imaginez également comment vous auriez pu intervenir dans votre cauchemar pour qu’il aboutisse à une belle fin. Il faut éviter de se complaire dans des images terrifiantes ou moroses", détaille la présidente du Réseau Morphée.
Allez voir un psychologue. Si malgré tout, au bout de plusieurs semaines, vos cauchemars persistent, n’hésitez pas à aller consulter. "Les images, choquantes, ressortent pendant le sommeil paradoxal, celui des rêves. Mais il existe des techniques pour classer ses émotions", assure le Dr François Duforez. Et d’énumérer : "vous avez par exemple la méthode de l’EMDR (Eye movement desensitization and reprocessing), qui consiste en un mouvement rapide des yeux devant une scène. Ou encore certaines méthodes d’autohypnose ou de relaxation, qui peuvent être efficaces, des thérapies dite comportementales et cognitives (TCC)". Ces méthodes doivent être encadrées par des professionnels. N’hésitez donc pas à vous adresser à un médecin généraliste : ces derniers disposent (normalement) d’un réseau et pourront vous aiguiller.