Le rebond de l'épidémie de coronavirus que connaît actuellement la France va-t-il se traduire un nouvel engorgement des services de réanimation ? Pour le professeur Bruno Mégarbane, médecin-réanimateur et chef de service à l'hôpital Lariboisière, à Paris, "il y a une discrète remontée des cas" mais "les choses restent à un niveau extrêmement bas en comparaison au pic que nous avons connu" au printemps. Selon le spécialiste, invité de Sans Rendez-vous, mardi, une nouvelle vague meurtrière pourrait néanmoins être évitée.
Depuis plusieurs semaines, les indicateurs quotidiens de l'épidémie se détériorent. "Depuis une quinzaine de jours, il y a une augmentation significative des admissions aux urgences et en réanimation, dans quasiment toutes les régions", observe le Pr Bruno Mégarbane. En France, 615 patients étaient en réanimation jeudi 10 septembre, contre 410 le 25 août et 396 le 10 août.
Des patients mieux pris en charge ?
À l'hôpital Lariboisière, il y a 18 lits en réanimation et, aujourd'hui, "cinq patients sont dans ce service, dont trois intubés et ventilés, avec des formes relativement graves de Covid-19", détaille le médecin-réanimateur. "On a l'impression que le nombre de patients augmente. Fin juillet, il n'y avait aucune nouvelle infection. Depuis, on a eu 17 patients à traiter, avec 17 nouvelles infections." Le niveau de saturation est cependant bien moindre qu'au printemps : "Au maximum, nous avons eu 56 patients intubés et ventilés."
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Malgré ce rebond, le Pr Bruno Mégarbane ne se veut pas alarmiste, pour plusieurs raisons : "On n'atteindra jamais le même nombre de patients qui vont arriver brutalement sur les services de soins", explique-t-il. "La saturation des lits sera moindre, donc on pourra admettre en réanimation des patients plus précocement et mieux les prendre en charge."
Charge virale moins forte
Depuis six mois, les services de réanimation de la France entière savent mieux faire face au Covid-19 : "On a fait des progrès en termes d'adaptation de l'oxygène, du meilleur moment pour faire l'intubation et on donne de la cortisone assez précocement. Cela permet de réduire le risque de décès et améliore l'évolution des patients. La prise en charge est meilleure parce qu'on connaît les complications."
Enfin, de manière moins évidente, "il est probable qu'en appliquant les mesures barrières, les contaminations se font avec des charges virales moindres", analyse le chef de service. "Les personnes contaminées le sont avec moins de quantité de virus et font donc des formes moins graves" de la maladie.
Les régions Grand Est et Île-de-France préservées ?
Les Bouches-du-Rhône et la Gironde, et plus particulièrement les métropoles marseillaises et bordelaises, sont particulièrement touchées par ce rebond de l'épidémie, avec des mesures spéciales annoncées lundi. Ces territoires avaient été moins touchés par la vague du printemps. Tout le contraire des régions Grand Est et Île-de-France, frappées par l'épidémie.
Pour autant, le rebond épidémique actuel ne devrait pas épargner ces régions. "Le premier pic épidémique a conduit à une immunité de la population générale relativement faible, de l'ordre de 5% à 6% au niveau du pays, peut-être jusqu'à 10% maximum dans les zones les plus touchées", avance le spécialiste. "C'est très largement inférieur au niveau où l'épidémie collective permettrait de freiner la circulation du virus. Toutes les régions sont susceptibles, de façon identique. Le risque de développer un rebond dépend strictement de la densité de population et du brassage des personnes", prévient-il.