C'est un des symptômes désormais connus du coronavirus : la perte d'odorat. Mais si environ 90% des personnes ayant perdu ce sens à cause du Covid-19 le retrouvent en quelques semaines, ce n'est pas le cas pour les 10% restants. Ce symptôme peut parfois durer plus d'un an. C'est en suivant plusieurs patients atteints d'anosmie que Pierre-Marie Lledo, chef de l'unité perception et mémoire à l'Institut Pasteur, a fini par trouver des traces du virus nichées dans l'épithélium olfactif, un organe situé dans la cavité nasale et qui permet de reconnaître les odeurs.
Une avancée considérable donc, qui entraîne beaucoup de nouvelles questions. "On ne sait pas encore si ce virus continue à se répliquer et si en respirant, les gens peuvent continuer à être contaminés, par exemple. Et deuxièmement, on n'avait jamais pu imaginer jusque-là qu'il faille traiter l'organe sensoriel avec des antiviraux ou des anti-inflammatoires des mois après", explique le scientifique.
Ces recherches en cours pourraient en effet donner un coup d'accélérateur au développement de sprays antiviraux pour traiter ces patients. Des chercheurs se demandent également si les séquelles neurologiques de certains patients sont justement liées à cette perte de l'odorat, et un essai clinique vient d'être lancé pour trouver la réponse.
Un virus "qui prolonge les handicaps"
Gabriel Lépousez, neurobiologiste à l’Institut Pasteur, spécialiste de la perception sensorielle, et de l’odorat en particulier, a également participé à cette découverte. "C'est très récent comme constat. Et on a pu montrer que chez ces quelques personnes qui ont une anosmie longue, même si le virus n'est plus présent du point de vue 'test positif', et bien il arrive à se nicher et à se cacher dans cette muqueuse pour continuer à endommager et à prolonger les dégâts ou les handicaps", a-t-il détaillé au micro d'Europe Matin mardi.
Selon lui, les chercheurs commencent à véritablement comprendre ce virus et la recherche avance considérablement à son sujet. "On se rend compte que le virus a un tropisme, c'est-à-dire qu'il aime beaucoup cibler les cellules des voies respiratoires supérieures et en particulier celles de la muqueuse olfactive qui se trouvent tout en haut de votre cavité nasale, entre vos deux yeux. C'est ce petit organe qui vous permet de sentir et d'appréhender toutes les molécules volatiles l'environnement", a-t-il encore expliqué.
Stimuler ses neurones pour retrouver l'odorat
Mais le neurobiologiste se veut rassurant. "Le système olfactif se régénère tout le temps. Pour qu'une cellule arrive à redevenir mature, il lui faut 30 jours, mais il lui faut aussi 3 à 6 mois pour se reconnecter au cerveau. C'est l'étape la plus longue dans ce processus de convalescence. Il faut donc prendre le temps et la patience de mesurer sa convalescence et une des meilleures manières qu'on ait trouvé aujourd'hui pour le faire, c'est de se stimuler", a-t-il poursuivi.
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Il conseille donc de sentir des odeurs de manière régulière, matin et soir, mais également de diversifier son alimentation pour augmenter ses chances de stimuler ses neurones. "Prenez des odeurs familières, comme ça vous les reconnaîtrez plus facilement et le plaisir sera renouvelé", édicte le chercheur.