Les requérantes étaient deux femmes nées en 1992, dont les demandes avaient été jointes. La première s'était pacsée en 2016 avec son compagnon après 11 ans de vie commune, mais celui-ci a appris peu après être atteint d'un cancer du cerveau. Il a effectué un dépôt de paillettes de sperme à l'hôpital de la Conception à Marseille.
Le couple s'est marié en janvier 2019 et la femme a bénéficié de deux cycles d'insémination intra-utérine, qui se sont soldés par des échecs. Son mari est décédé peu après et la requérante a demandé l'exportation des gamètes de son époux vers l'Espagne, pays qui autorise la procréation post mortem.
Le Code de la santé publique français interdit la procréation posthume
La seconde requérante et son mari étaient parents de deux enfants nés en 2004 et 2018, le second par fécondation in vitro car l'époux était atteint d'une leucémie. Cinq de leurs embryons ont été conservés au CHU de Brest en février 2018. Après le décès de son mari en avril 2019, la requérante demanda également le transfert de ses embryons en Espagne.
Dans les deux cas, les autorités françaises ont refusé de faire droit à leurs demandes. En effet, le Code de la santé publique français interdit la procréation posthume et l'exportation de gamètes ou d'embryons à des fins prohibées par la loi. Les deux trentenaires estimaient que Paris avait violé l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, qui protège le droit au respect de la vie privée et familiale.
"La CEDH souligne que le Conseil d'État a exercé son contrôle sur les refus litigieux conformément à la méthodologie qu'il avait arrêtée" dans une précédente décision. "Elle en conclut que les autorités internes ont ménagé un juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu, que l'État défendeur n'a pas outrepassé la marge d'appréciation dont il disposait" et que la France n'a donc pas violé la Convention.
Un bémol
Cependant, la CEDH émet un bémol : elle reconnaît ainsi que l'ouverture depuis 2021 par le législateur de l'assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes seules "pose de manière renouvelée" la question de la pertinence de l'interdiction de la procréation à titre posthume en France.