Et si la cigarette électronique créait une nouvelle génération de fumeurs ? Dans son dernier rapport, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pointe du doigt les techniques de l'industrie du tabac pour rendre la cigarette électronique attractive, avec notamment les arômes donnés aux produits. Plus de 16.000 parfums différents ont été recensés par l’OMS. Un moyen de séduire les jeunes, selon certains professionnels. Pour d’autres, le vapotage reste la manière la plus efficace d’arrêter de fumer.
"Ces arômes ne servent pas aux fumeurs pour arrêter de fumer", estime Yves Martinet. Pour ce pneumologue, président du Comité national contre le tabagisme, "ils sont là pour séduire les enfants, pour qu’ils passent à l'addiction à la nicotine". Les tabatiers utiliseraient donc la cigarette électronique pour vendre, à l’avenir, plus de cigarettes classiques. Et pour cause, "les parfums vont masquer les risques addictifs de la nicotine et le caractère désagréable de sa consommation", détaille Yves Martinet.
La cigarette électronique "est un produit de sortie du tabac"
Comme l'OMS, Yves Martinet estime qu'il faut plus de réglementation. D'abord, s'assurer que l'interdiction de vente aux mineurs est respectée. Puis, il demande que des mesures mises en place pour la cigarette traditionnelle soit étendue à la cigarette électronique, avec une taxation par l'État des produits et une interdiction dans les espaces recevant du public.
Une position qui n’est pas partagée par Bertrand Dautzenberg, médecin pneumologue, invité sur Europe 1 vendredi matin. Le tabacologue et président de Paris sans tabac souligne la différence clairement existante entre le tabac classique, la cigarette chauffée et l’électronique. Le tabac chauffé ressemble à une cigarette électronique, avec une résistance, mais elle chauffe du vrai tabac. "Dans son rapport, l'OMS fait une assimilation qui est contraire à la santé publique", avance-t-il. "Ce sont des produits radicalement différents, l’un est produit du tabac. L'autre est un produit de sortie du tabac", poursuit Bertrand Dautzenberg.
Aux États-Unis, "un effondrement très important de la consommation de tabac"
Et la cigarette électronique ne rendrait pas plus accro les enfants, selon ce même pneumologue. "La plupart des jeunes qui commencent à fumer ne mettent pas de nicotine dedans. Ceux qui le font en mettent très peu. Et surtout, beaucoup l'essayent mais ne l'utilisent pas de façon régulière", démontre Bertrand Dautzenberg. En effet, un jeune qui démarre la cigarette électronique a un risque sur six de devenir fumeur un an après, alors que celui qui commence par la cigarette sera fumeur dans un cas sur deux. Bertrand Dautzenberg prend l’exemple des États-Unis où "on voit un effondrement très important de la consommation de tabac. Maintenant, ils sont environ 5% de fumeurs quotidiens."
En ce qui concerne la règlementation préconisée par l’OMS, Bertrand Dautzenberg martèle que la France est déjà très en avance sur ce point. "Il n'y a pas tellement d'inquiétude à ce niveau-là", conclut-il.