Pour Éric Caumes, rien ne justifie l'entrée en vigueur aujourd'hui d'un pass vaccinal en France. Invité vendredi de l'émission Europe Matin, l'infectiologue qui exerce à l'hôpital Hôtel-Dieu de Paris a pointé "une erreur d'un point de vue épidémiologiste, santé publique et médical" pour gérer la crise sanitaire, au micro de Dimitri Pavlenko. "À l'époque de Delta, cela pouvait se concevoir. Mais à l'époque d'Omicron, c'est inconcevable parce que le vaccin n'empêche pas la circulation en population générale", a ajouté l'infectiologue sur Europe 1.
Le pass vaccinal, une mesure "électoraliste"
Si la vaccination "empêche de rentrer en hospitalisation et en réanimation", Éric Caumes a souligné que le nombre de contaminations quotidiennes - près de 300.000 encore ce jeudi - montre que cela ne contraint pas la circulation du variant Omicron, qui représente 75% des cas en France contre 25% pour Delta, a-t-il par ailleurs estimé. Le gouvernement souhaite pourtant mettre en place le pass vaccinal pour pousser les Français non-vaccinés à le faire, et contraindre les près de 600.000 qui n'ont pas fait leur dose de rappel.
Pour Éric Caumes, cette mesure est électoraliste. "On est dans la campagne électorale. L'affaire des anti-vax aussi, c'est pareil. Ce n'est ni de la médecine, ni de la santé publique", a taclé l'infectiologue sur Europe 1, avant de poursuivre : "C'est un marqueur d'affichage et de clivage".
Une quatrième dose "indispensable" pour les plus fragiles
Malgré l'apparente non-dangerosité du variant Omicron, Éric Caumes a indiqué néanmoins que la vaccination était primordiale pour les personnes fragiles, avec l'arrivée des troisièmes et quatrièmes doses. "Cela m'apparaît indispensable. Ce qu'on est en train de découvrir avec ce coronavirus, et sans doute que d'autres circulent aussi, c'est qu'une infection ne confère pas une immunité définitive, tout comme la vaccination", a-t-il expliqué au micro de Dimitri Pavlenko.
L'infectiologue a évoqué "l'immunité labile". "Au bout de cinq-six mois, l'immunité qui est conférée par le vaccin est devenue mauvaise, donc il faut entretenir la vaccination chez les personnes à risque", a expliqué Éric Caumes, appuyant que "les personnes jeunes ne risquent rien". "Je trouve qu'on a fait une erreur stratégique : on aurait dû se concentrer sur les personnes qui sont vraiment à risque, c'est-à-dire les plus de 60 ans et les plus fragiles", a exposé le professeur, qui a prévenu qu'il fallait "déjà se mettre en ordre de marche pour la quatrième (dose)".
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Le variant Omicron est "incontrôlable"
S'il s'est opposé à laisser circuler le virus avant, Éric Caumes a expliqué "qu'Omicron a changé la donne. Je constate que ce virus est incontrôlable. C'est un casse-tête dans les écoles, les collèges et les lycées. Donc, il faut mettre le paquet sur les personnes qui n'ont pas reçu la troisième dose. Il y a des personnes à risque par millions qui n'ont pas reçu la troisième", a-t-il assuré sur Europe 1.
L'infectiologue a tenu à rassurer les Français qui viennent de recevoir leur dose de rappel : "(La quatrième dose) n'est pas nécessaire (maintenant). Ils en auront besoin dans quatre ou six mois s'ils n'ont pas attrapé le Covid entre temps parce que sinon, ils n'auront pas besoin de doses, cela fera office de rappel vaccinal". Pour lui, cette dernière remarque doit être une composante du futur pass vaccinal. "Il doit tenir compte de l'infection naturelle parce que c'est probablement plus efficace que le vaccin pour protéger contre la gravité d'une infection ultérieure", a-t-il défendu.
Pour conclure, Éric Caumes a souligné qu'il était bénéfique pour les personnes vaccinées d'attraper le virus pour leur conférer une immunité naturelle. "Le vaccin est efficace pour éviter de rentrer à l'hôpital, mais n'est pas efficace pour éviter la circulation du virus. C'est pour cela que le pass vaccinal n'a pas beaucoup de sens avec Omicron", a appuyé l'infectiologue de l'hôpital Hôtel-Dieu à Paris.