Dans La France bouge sur Europe 1, Raphaëlle Duchemin recevait mardi trois spécialistes du traitement de la douleur. Tous trois proposent des solutions innovantes pour soustraire le patient à la prise d'opioïdes. Le recours à ces traitements sous antalgiques comme la morphine sont en effet la cause d'addiction, d'intolérance voire de dépression respiratoire. Aux Etats-Unis par exemple, 11 millions de personnes sont dépendantes aux opiacés et à leurs dérivés. Cette dépendance intervient alors que les traitements sont fournis sur prescription médicale. En France, une personne sur trois subit des douleurs chroniques, c'est-à-dire des douleurs soit permanentes soit récurrentes qui durent plus de trois mois.
1) Un stimulateur d'endorphine par ondes millimétriques
La première solution, présentée par Jacques Husser, PDG et cofondateur de Remedee Labs, est un stimulateur d'endorphine par ondes millimétriques. Cette méthode était largement employée dans les pays de l'Est dans les années 70. Elle a été découverte par hasard par des soldats russes, qui ont constaté qu'ils se sentaient mieux lorsqu'ils se trouvaient près d'antennes radars qui utilisaient des ondes millimétriques, c'est-à-dire des ondes à très haute fréquence.
Abandonnée avec l'arrivée des antalgiques, la technique jouit aujourd'hui d'une seconde jeunesse. "Le but est d'envoyer un signal électronique de très haute fréquence qui stimule les récepteurs de la douleur sous la peau", précise Jacques Husser. "Ces récepteurs envoient un message au cerveau pour que ce dernier libère de l'endorphine" et soulage le patient.
Pour rappel, l'endorphine est "un produit qui est l’antalgique naturel du corps". Le procédé repose donc sur des éléments déjà présents dans le corps humain et "c'est toute la beauté de cette méthode", s'enthousiasme le cofondateur de Remedee Labs.
2) Un nano-médicament pour prescrire directement de l'endorphine
"Lorsque l’on fait du sport de manière suffisamment intense, on a un sentiment de bien-être après. Ceci est dû aux endorphines et plus spécifiquement aux enképhalines délivrées par le cerveau", complète Patrick Couvreur, professeur en pharmacie à l'université de Saclay, membre de l'académie des Sciences et président de l'Académie nationale de pharmacie.
Partant de ce constat, le chercheur s'est demandé comment prescrire directement de l'enképhaline à un patient, en intraveineuse, en prenant en compte une contrainte majeure : la volatilité de l'enképhaline. "La molécule d'enképhaline se dégrade instantanément dans l'organisme, sans jouer son rôle d'antidouleur" lorsqu'elle est inoculée, analyse le professeur.
La solution, en phase de tests pré-cliniques actuellement, consiste donc à mixer l'enképhaline avec des lipides présents naturellement dans notre corps. "Le lipide permet d’encapsuler l’enképhaline et donc de l’administrer sans dégradation", explique Patrick Couvreur qui ajoute : "Par ce biais-là, nous évitons en plus les phénomènes d’addiction et d’intolérance".
3) Un patch antidouleur par neuro-stimulation électrique
La dernière solution, proposée par Nicolas Karst, président et cofondateur de Sublimed, consiste à générer de faibles impulsions électriques afin d'inhiber les douleurs chroniques et ce à l'aide d'un patch placé sur la peau du patient. Le procédé existait déjà mais était très encombrant et peu pratique.
"Nous avons donc répété ce procédé mais à travers un patch, beaucoup plus petit, qui se place sur la peau sous les vêtements", détaille Nicolas Karst. "La zone stimulée sera indiquée par le médecin et le patient peut utiliser son patch soit toute la journée soit plusieurs fois par jour", dit-il encore. Selon les impulsions électriques envoyées, soit le patient enlève ponctuellement la douleur comme s'il appuyait sur un interrupteur "on-off", soit il stimule davantage son cerveau pour libérer de l'endorphine et endormir la douleur sur une période plus longue.
Cette solution, déjà commercialisée, profitent à plus de 3.000 personnes en France.