Les médicaments contre l'acidité gastrique diminuent l'efficacité de certains traitements anticancéreux, au point de réduire la durée de survie des patients qui en prennent, montre une étude publiée jeudi.
Au vu de ces résultats, "les médecins et les pharmaciens devraient particulièrement surveiller les patients qui prennent ces deux traitements simultanément", estime Olivier Mir, oncologue médical et pharmacologue à l'institut Gustave Roussy, en région parisienne, et co-auteur de l'article, dans un communiqué du centre de lutte contre le cancer.
"La survie globale" peut être réduite. Chez les patients atteints de sarcome des tissus mous avec métastases, "l'utilisation concomitante d'un médicament diminuant l'acidité gastrique et du pazopanib (un anticancéreux commercialisé sous la marque Votrient, NDLR), réduit considérablement la survie sans progression de la maladie ainsi que la survie globale", conclut cette étude, publiée dans la revue Clinical Cancer Research.
Ses auteurs ont analysé les données de 333 patients inclus dans deux essais cliniques menés par le groupe pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline pour demander l'autorisation de mise sur le marché du Votrient pour le traitement des sarcomes. Résultat : chez les patients ayant pris un anti-acide pendant au moins 80% de la durée de leur traitement au pazopanib, la durée médiane de survie sans progression du cancer n'a été que de 2,8 mois, contre 4,6 mois chez ceux qui n'ont pas eu recours au traitement anti-acide. Et la survie globale médiane était de 8 mois pour ceux sous médicaments anti-acide pendant au moins 80% de la durée du traitement au pazopanib, "contre 12,6 mois pour ceux qui n'en ont pas pris".
Les traitements peuvent réduire l'absorption du pazopanib par l'estomac. Des études antérieures ont déjà démontré que ces traitements anti-acide, comme l'oméprazole (Mopral), l'esoméprazole (Inexium) ou la ranitidine (Azantac), réduisaient le taux de pazopanib dans le sang de patients atteints de tumeurs solides, rappelle l'institut Gustave Roussy.
En effet, "les comprimés de pazopanib pris par voie orale doivent passer dans un milieu acide, c'est-à-dire dans l'estomac, pour se dissoudre. Comme la principale fonction du traitement anti-acide est de réduire l'acidité de l'estomac, ces traitements peuvent diminuer l'absorption du pazopanib", explique le Dr Mir. Pourtant, selon l'institut, "jusqu'à 50% des personnes qui suivent un traitement contre le cancer prennent aussi ce type de traitement".
"Modifier la prise en charge des patients". Selon le Dr Mir, "les résultats de cette analyse devraient inciter les oncologues à modifier la prise en charge de leurs patients", d'autant que "les patients ont souvent recours à des anti-acide pour soulager des douleurs abdominales qui ne sont pas toujours directement liées à l'acidité de l'estomac" et pourraient donc "avoir recours à un traitement différent".
Le pazopanib est indiqué dans le traitement du cancer du rein avancé et de certains sarcomes des tissus mous.