Les Français et les vaccins : pas vraiment une histoire d'amour. Selon une étude publiée vendredi par des chercheurs anglais dans la revue EBioMedecine et notamment relayée par Le Monde, quatre Français sur dix estiment que les vaccins ne sont pas sûrs. C'est trois fois plus que la moyenne mondiale. Cette étude est aussi la plus large jamais menée sur le sujet. Plus de 65.000 personnes ont ainsi été interrogées dans près de 67 pays, entre septembre et décembre 2015.
Les vaccins ne sont pas sûrs pour 41% des Français. Il apparaît que c'est en Europe, et en particulier la France, que l'on accorde le moins de crédit aux vaccins. 41% des Français considèrent en effet qu'ils ne sont pas sûrs. Ils réagissaient à quatre affirmations : "Il est important pour les enfants de recevoir les vaccins", "dans l'ensemble, je pense que les vaccins sont sûrs", "dans l'ensemble, je pense que les vaccins sont efficaces" et "les vaccins sont compatibles avec mes croyances religieuses". Pour 17% des Français, les vaccins ne sont pas efficaces.
"Les autorités de santé n'ont pas fait leur travail". Comment expliquer cette défiance ? Interrogé par Europe 1, le professeur Robert Cohen, infectiologue, apporte des réponses. Pour lui, "le tournant a été la décision de Bernard Kouchner d'arrêter la vaccination contre l'hépatite B dans les écoles sans aucune preuve que ce vaccin ait vraiment induit la sclérose en plaque". Rappelons qu'en 1994, une vaste campagne est lancée par le gouvernement visant à vacciner plus de 20 millions de Français contre l'hépatite B, un virus qui entraîne des cirrhoses ou des cancers du foie. Mais l'Agence française de sécurité sanitaire reçoit des signalements d'effets indésirables et l'on s'interroge sur le lien entre le vaccin et l'apparition de certaines maladies neurologiques, dont des scléroses en plaque. En 1998, le secrétaire d'Etat à la Santé Bernard Kouchner suspend la vaccination dans les collèges. "Aujourd'hui, plus de 20 ans, on n'a toujours aucune preuve que ce vaccin induise des scléroses en plaque et nous sommes le seul pays du monde à encore avoir un doute sur ce plan-là", affirme le professeur Cohen. "Ça c'est le péché originel".
L'infectiologue liste ensuite "toute une série de crises" qui ont renforcé la défiance des Français à l'égard des vaccins. Il cite ainsi la "vaccination de la grippe H1N1 ou la vaccination contre le HPV". Vaccin "pour lequel les autorités de santé n'ont pas fait leur travail de rassurer la population sur des effets indésirables qu n'avaient rien de particulier". Le spécialiste conclut : "le bénéfice l'emporte largement sur le risque".