"J'ai ressenti la plus belle émotion de ma vie. Cela n'a rien de scientifique. J'ai pris conscience que j'étais devant une très grande œuvre d'art". Voilà ce qu'a écrit le préhistorien Jean Clottes quand il voit pour la première fois en 1994 les parois ornées de Chauvet, en Ardèche. Cette émotion, peut-être la ressentirez vous si vous visitez la caverne du Pont-d'Arc, sa réplique à l'identique, qui ouvrira au public le 25 avril. Alors que le président François Hollande était sur place vendredi pour l'inaugurer, Europe 1 vous propose de découvrir cette sœur jumelle de Chauvet en images.
Chevaux sauvages, rennes et aurochs, une espèce de bovidé aujourd'hui disparue.
1.000 dessins. La caverne du Pont-d'Arc reproduit les dessins de la grotte Chauvet qui sont uniques en leur genre. Âgés de 36.000 ans, ils sont considérés comme les plus anciens de l'histoire de l'humanité. Ils ont aussi la particularité d'être très bien conservés et en grand nombre. En tout, 1.000 dessins, tous reconstitués dans la caverne du Pont-d'Arc. Ses peintures sont appelées rupestres, c'est-à-dire qu'elles ont été faites sur un mur. Leur parfait état s'explique sans doute par le fait qu'il y a 20.000 ans, le plafond de l'entrée s'est effondré, obstruant la grotte jusqu'à sa découverte en 1994. Lascaux en Dordogne, qui était considéré jusqu'à cette date comme le summum de l'art préhistorique, est alors détrôné.
Des rhinocéros laineux représentés en superposé pour donner une impression de mouvement.
L'animal au cœur de l'art préhistorique. Les hommes de la Préhistoire offraient dans leurs dessins une place privilégiée aux animaux. La grotte Chauvet n'échappe pas à cette règle. Son bestiaire, impressionnant, comprend 425 figures animales de 14 espèces différentes dont la majorité sont dangereuses et en partie disparues aujourd'hui : mammouths, ours des cavernes, félins, élans, lions des grottes.
Des têtes de lion qui font la particularité de Chauvet, puisque cet animal n'a été que très rarement représenté dans les grottes de la Préhistoire.
Un art codifié. Le désordre semble régner mais en réalité, l'art de la Préhistoire est codifié. La représentation en superposé par exemple donne une impression de mouvement et de rythme mais aussi de perspective. On y trouve très rarement des lignes d'horizon, des éléments de paysage, des humains ou des animaux représentés de face. Enfin, les hommes de la Préhistoire ne respectent pas les tailles respectives des animaux mais les représentent plutôt groupés selon leur type d'habitat, par exemple des bisons et des aurochs ensemble.
Peintures par la technique dite "de l'imprimerie", leurs auteurs enduisaient leurs mains de peinture puis les apposaient sur les parois.
Pochoirs. Si les hommes de la Préhistoire gravaient la pierre, ils peignaient aussi avec les doigts, avec des pinceaux ou par apposition de leurs paumes contre la paroi. Ils projetaient aussi des couleurs sur les parois en soufflant sur des pigments déposés au creux de leurs mains. En déposant un objet devant eux, ils réalisaient ainsi des pochoirs avant l'heure. Charbon de bois et ocre rouge constituaient l'essentiel de leurs couleurs.
Un gravage de la roche qui en utilisant la couleur blanche sous-jacente fait jaillir de la roche des chevaux sauvages et des mammouths.
Glaciation. Ces peintures rupestres datent de 36.000 années, soit la dernière glaciation, comme l'ont prouvé des analyses scientifiques mais aussi la datation des restes retrouvés dans le sous-sol de la grotte Chauvet. Les archéologues y ont en effet découvert des restes osseux, des morceaux de charbon, des anciens foyers qui montrent que la grotte a été occupée sur deux périodes : il y a environ 36.000 ans, puis une seconde fois, il y a 27.000 ans à peu près.
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