Après des semaines de suspens, Space X va enfin lancer sa super fusée mardi à partir de 19h30. La Falcon Heavy décollera en effet du pas de tir du Centre spatial Kennedy de la Nasa, en Floride. Munie de 32 moteurs, haute de 70 mètres, elle sera capable de transporter 64 tonnes en orbite basse ou 27 tonnes en orbite géostationnaire. Si ce premier vol réussit, Space X sera en possession du plus gros lanceur du monde.
The first test flight of Falcon Heavy is targeted for Tuesday, Feb. 6th at 1:30 PM ET from Launch Complex 39A at Kennedy Space Center in Florida. When Falcon Heavy lifts off, it will be the most powerful operational rocket in the world by a factor of two. https://t.co/jzv975xKB0pic.twitter.com/yAVGdXJjEs
— SpaceX (@SpaceX) 6 février 2018
"Une fusée entièrement réutilisable". Pour Alain Cirou, expert sciences et rédacteur en chef du magazine Ciel et Espace, si son premier lancement est réussi, la Falcon Heavy sera bien la plus puissante, avec une poussée équivalente à 18 Boeing 747. Mais là n'est pas le plus impressionnant selon lui. Si "le spectacle" sera bien au rendez-vous, c'est que c'est "une nouveauté d'imaginer une fusée entièrement réutilisable" : "c'est un fagot de trois fusées existantes qui vont décoller, se séparer et vont revenir se poser" sur Terre, a-t-il expliqué dans Europe 1 Bonjour. Dans des tests précédents, deux d'entre eux sont déjà parvenus à revenir.
"De la com' pour faire rêver". Mais dans la conception de ce mastodonte de l'espace, Alain Cirou voit surtout "de la com'", voire de "la propagande du côté de Musk (Elon Musk, le patron de Space X, ndlr)". Car malgré sa puissance, elle n'est pas encore au niveau d'Apollo, le programme de la Nasa qui, de 1961 à 1975, a pu envoyer des hommes sur la Lune avec un lanceur capable de porter 140 tonnes. Mais "Musk raconte une histoire" en faisant croire que Mars est à portée de main immédiate : "c'est un conte car on n'ira pas sur Mars dans les deux ans à venir mais simplement ça fait rêver et, aux Etats-Unis, ça rapporte de l'argent". Le rêve, c'est aussi la Tesla qui est à bord de ce premier vol de la Falcon Heavy et qui sera larguée dans l'espace. A son bord, un mannequin, Space Man, comme on peut le voir dans le clip promotionnel de Space X, au son de Space Oddity de David Bowie.
Les Etats-Unis veulent "du choix". Pour les Etats-Unis, la Falcon Heavy représente un enjeu de taille car après son abandon des navettes, c'est aujourd’hui Ariane qui domine le marché des satellites civils. Les Américains cherchent donc "à ne pas dépendre des Russes" pour de nouveau envoyer des hommes dans l'espace et à "avoir un choix de fusée", explique Alain Cirou. A côté de Musk, "Boeing" et "Jeff Bezos, le patron d'Amazon" sont aussi en lice pour explorer l'espace, rappelle-t-il. "Dans quelques années aux Etats-Unis, on disposera de trois lanceurs super lourds capables d'amener des charges vers la Lune, vers Mars", juge-t-il.
Ariane menacée ? "Ariane a des raisons de s'inquiéter", estime aussi Alain Cirou. Car du côté de l'Europe, l'idée de fusée réutilisable n'a pas encore été adoptée. A l'avenir, cette concurrence va poser question : "les Européens seront-ils solidaires de leur marché spatial ? Est-ce que on veut être indépendants et avoir notre propre lanceur ?".