L’eau potable est une ressource précieuse, et la France en perd 20% à cause de fuites. Les sécheresses de ces dernières années n'ont rien arrangé et ont également occasionné des tensions sur l’approvisionnement, comme en Provence, où des camions citernes ont parfois acheminé cet or bleu à des communes en manque d’eau. Depuis quelques années, conscientes de cet enjeu, les collectivités redoublent de vigilance pour optimiser leur rendement en eau potable. C’est le cas du Syndicat des eaux d’Île-de-France, le Sedif, qui a confié l’exploitation de son réseau à Veolia. Il y a cinq ans, 1.200 kilomètres de canalisations étaient "écoutés" chaque année par des techniciens pour détecter les fuites. Aujourd’hui, cette recherche s’est étendue à 2.400 km par an, soit le double.
Ce jeudi matin, Abdellah Akalmous, technicien en recherche de fuites, sillonne les rues d’Antony, en banlieue parisienne. Casque sur les oreilles, il dévisse une à une les trappes du trottoir. "Je fais descendre mon capteur acoustique via la trappe ouverte", décrit-il. "Il est doté d’un aimant donc ça me permet d'avoir un bon contact avec la conduite", précise Abdellah Akalmous.
Écouter le bruit de l'eau pour localiser la fuite
Une fois le micro posé, et son enregistreur allumé, Abdellah écoute et analyse, dans son casque, le bruit de l’eau. "Ici j'ai un bruit de tirage, ce sont des bruits de consommation d'eau, de quelqu’un qui fait écouler l’eau de son robinet par exemple", explique-t-il. Ce technicien de Veolia sait distinguer à l’oreille le bruit d’une consommation courante de celui d’une fuite. Et plus loin justement, il en repère une : "C’est un bruit de fuite", affirme-t-il, une fois le son écouté quelques mètres plus loin.
"Je vais me déplacer pour savoir si ce même son revient au point suivant, et avec quelle intensité". En comparant ainsi les sons sur toute la rue, Abdellah localise le tuyau défaillant. Et le signale immédiatement à l'équipe de réparation.
De 15% d’eau perdue, le Sedif est passé à moins de 10% en cinq ans
Cette traque des fuites n’est pas nouvelle. Mais depuis cinq ans, le nombre de canalisations écoutées a doublé. Ces analyses sonores permettent d’intervenir en urgence pour réparer les tuyaux et alimentent, également, une base de données très précieuses, souligne Frédéric Michot, adjoint au directeur de la coordination d’exploitation du réseau chez Veolia.
"Toutes ces informations servent à élaborer des algorithmes, qui nous permettent de déterminer des taux de défaillance prédictifs sur les ouvrages, pour ainsi réaliser des programmes de renouvellement de réseaux", étaye-t-il. Il y a cinq ans, 15% de l’eau du réseau du Sedif était perdue. Aujourd'hui, grâce à ces dispositifs mis en œuvre, c'est moins de 10%. Soit moitié moins que la proportion moyenne d’eau qui s’échappe des canalisations françaises.