L'activiste Rachid Nekkaz a été condamné jeudi à 18 mois de prison avec sursis et à 5.000 euros d'amende par le tribunal correctionnel de Paris pour l'achat du parrainage d'un maire à la présidentielle de 2012, par lequel il disait vouloir démontrer la fragilité de la procédure électorale. Le maire de la petite commune de Mertze, dans le Haut-Rhin, Charles Schwartzentruber, qui avait accepté 648 euros en liquide de Nekkaz en échange de son parrainage, a écopé de 2.000 euros d'amende pour corruption passive.
Rachid Nekkaz disait vouloir démontrer la fragilité et la corruptibilité du système des parrainages. Il avait annoncé aux médias les conditions d'achat de cette signature avant son dépôt au Conseil constitutionnel, ce qui avait rendu le document invalide. Le président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré, qui avait mis en garde contre toute manipulation de la procédure des parrainages, avait alors porté plainte pour "corruption" contre Rachid Nekkaz qui avait été interpellé et mis en examen. Ce délit est passible de dix ans de prison. "Il ne s'agit pas ici de sanctionner des idées artificielles, mais un comportement qui s'inscrit en violation et dans le mépris des institutions de notre pays", avait dénoncé la représentante du ministère public, Chantal De Leris, en s'interrogeant sur la personnalité du prévenu. "Qui êtes-vous: un doux rêveur, un trublion, un frimeur ou un farfelu?", a-t-elle lancé, mettant en doute son désintéressement. "Vous faites ça pour qu'on parle de vous".
L'avocat de Rachid Nekkaz, Matthieu de Vallois, avait plaidé "une dispense de peine", défendant la démarche politique de son client, et celui du maire alsacien, Me Sylvain Degrâces, "une peine d'amende" pour "un petit élu local un peu naïf". A l'audience, Rachid Nekkaz, 40 ans, vêtu de noir, les cheveux longs, avait assumé sa démarche expliquant avoir lui-même été victime de pressions exercées par l'UMP contre 70 maires lui ayant promis leur parrainage pour se présenter à la présidentielle de 2007. "Depuis lors, je milite pour les parrainages anonymes", avait-il expliqué, arguant que les maires de petites communes ne pouvaient résister aux grands partis de peur de perdre leurs subventions.
En 2007, il avait lui-même acheté pour 1.550 euros le parrainage d'André Garrec, maire de Noron-la-Poterie, en Basse-Normandie, qui l'avait mis aux enchères, avant de déchirer le document en direct sur une chaine d'information. En 2012, il a donc décidé de passer à la vitesse supérieure en achetant le fichier des maires de France auxquels il a fait parvenir un mail leur proposant de l'argent, 648 puis 1.352 euros, soit deux fois l'indemnité d'un édile d'une commune de moins de 500 habitants, en échange du parrainage d'une candidate: Marine Le Pen, Corine Lepage ou Cindy Lee, ex-stripteaseuse qui avait fondé le "parti du plaisir".