Le chiffre. En France, un tiers des hommes atteints d'un cancer de la prostate sont surtraités, selon une analyse publiée par la Revue du Praticien, un mensuel destiné aux médecins généralistes, et relayée par le site Pourquoi Docteur.
"Beaucoup n'ont de cancer que le nom". A la suite d'un examen, lorsque des cellules cancéreuses sont détectées, beaucoup d'hommes sont orientés, parfois à leur demande, vers la chirurgie, des rayons ou une chimiothérapie. Or, le dépistage a fait des progrès depuis dix ans et on est aujourd'hui capable d'identifier des cancers de la prostate non agressifs dont l'évolution sera lente.
Ainsi, parmi les patients traités, "beaucoup d'entre eux n'ont de cancer que le nom", affirme au micro d'Europe 1 le professeur François Desgrandchamps qui dirige le service d'urologie de l'hôpital Saint-Louis à Paris qui a coordonné l'analyse. "Ce sont en fait des formes de vieillissement de la prostate qui peuvent être simplement surveillées." D'où des statistiques "édifiantes", selon le professeur : un quart des hommes âgés de 50 ans et 80% des hommes de 80 ans présentent un foyer de cancer de la prostate non agressif. Pour ce type de cancer, "c'est une honte de le traiter parce qu'il ne va pas évoluer", condamne le Pr Desgrandchamps.
Des séquelles. Or, ces traitements ne sont pas anodins. Au-delà des effets psychologiques, les séquelles physiques peuvent être importantes : un homme opéré sur dix est incontinent et un sur trois est impuissant. Après une radiothérapie, ils sont même deux tiers à souffrir d'impuissance.
Pourquoi un tel zèle ? La première raison est liée à la peur associée au mot "cancer", estime le professeur. "Dans la tête des praticiens comme des patients, cancer = mort = traitement, sinon risque mortel", explique le Pr Desgrandchamps. "C'est l'équation habituelle. Là, ce n'est pas le cas : il n'y a pas un mais des cancers de la prostate et certains ne sont pas graves."
Une deuxième raison est plus économique : la tarification à l'activité et les classements des hôpitaux qui s'appuient sur le nombre d'actes médicaux réalisés poussent les praticiens à traiter plus que nécessaire. Plus taboue, cette raison ne peut être ignorée même si elle est concerne une minorité de médecins.