La machine à écrire est morte, vive la "Machine à lire" ! Celle-ci a fait son apparition depuis plus de deux ans au Havre, en Seine-Maritime. Qu'entend-t-on par "Machine à lire" ? Il s'agit d'une tablette où l'utilisateur, qui n'a aucune notion de la taille du texte, peut alterner les phases d'écoute et les phases de lecture. L'objectif : que les phases d'écoute soient progressivement réduites et les phases de lecture allongées, d'où le terme de "Machine à lire".
"Les recherches expérimentales les plus récentes montrent clairement que ce qui handicape véritablement les lecteurs peu aguerris c'est bien l'incapacité et la crainte d'affronter une distance de lecture dépassant quatre à cinq pages", a expliqué le linguiste Alain Bentolia, à l'origine du concept. "Quand on voit le nombre d'élèves qui rentrent au collège et qui en sortent sans maîtriser les fondamentaux de la lecture et de l'écriture, soit globalement un élève sur cinq, et le nombre d'adultes qui ne maîtrisent pas suffisamment les mots de la langue française pour pouvoir s'exprimer, on se dit qu'il faut consacrer toute notre énergie à cette priorité-là."
Incluse dans le dispositif "Plus de maîtres que de classes". L'expérience menée depuis plus de deux ans au Havre, une ville qui a une politique très active en matière de lecture, se déroule pour le moment en activité péri-scolaire. Mais dès la rentrée de septembre, elle sera introduite dans des écoles primaires au Havre mais aussi dans d'autres villes de France, dans le cadre du dispositif "Plus de maîtres que de classes", mis en place par le ministère depuis 2012. "Ce dispositif, dont on parle assez peu, est un vivier de 2.500 établissements où un enseignant en surnuméraire, qui n'a pas de classe attitrée, peut passer de classe en classe pour aider les enfants en difficulté et aider ses collègues", a précisé la ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, présente au Havre lundi. "Cette 'Machine à lire' est un excellent outil pour ces enseignants, en matière d'aide à la lecture."
"Textes raccourcis". L'application comprend déjà 35 titres, des livres jeunesse, et des classiques comme l'Odyssée d'Homère, Aladin, Les Trois Mousquetaires et bientôt Notre-Dame de Paris. "Les textes ont été raccourcis et on a conservé uniquement les passages où il y a de l'action, en enlevant les parties descriptives, mais on ne réécrit pas Victor Hugo", assure Alain Bentolila. "Nous prenons les enfants comme ils sont aujourd'hui, c'est-à-dire familiers des séries télévisées où l'action est prépondérante." Le but ultime de l'opération est que les enfants se tournent in fine vers les textes originaux. "Après un certain temps, 25 à 30% d'entre eux l'ont fait", a insisté le linguiste.