Il était le directeur de l’Hyper Cacher depuis quatre jours seulement. Patrice Oualid a été blessé par balle au bras par Amedy Coulibaly, lorsque celui-ci a pris en otage l’épicerie de la Porte de Vincennes à Paris, vendredi 9 janvier. En convalescence, le directeur de la supérette s’est confié, pour la première fois, mercredi, au Parisien.
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Juste avant. Les minutes qui précèdent l’entrée du terroriste relèvent du quotidien normal d’une épicerie. “J’étais au rayon des chips”, raconte Patrice Oualid, “Yohan (qui sera l’une des quatre victimes) était dans ce coin aussi, Lassana remplissait le congélateur”. Vers 12h30-13 heures, soit quelques minutes avant l’entrée d’Amedy Coulibaly, “c’est le pic d’affluence”, explique Patrice Oualid. Vendredi est, en effet, le jour de shabbat pour les juifs.
“J’ai senti quelque chose de chaud sur moi”. Soudain, “une détonation très forte” retentit. “J’ai pensé à une bombe, une grenade”, témoigne Patrice Oualid. Le directeur voit son employé Yohan s'écrouler. S’il n’entend pas le terroriste, Patrice Oualid “a vu ses yeux” et “la mort dans son regard”. “J’ai compris que j’allais mourir. J’ai pensé à ma femme, mes enfants et je ne sais pas ce qui m’a pris, je suis parti vers la sortie”, poursuit-il. Un geste qui lui vaut d’être visé par Amedy Coulibaly : “j’ai entendu une deuxième détonation et une fois dehors, j’ai senti quelque chose de chaud sur moi”. “C’était le sang, mon bras était ballant”, comprend-il.
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En sécurité. Le directeur de l’épicerie court alors en direction d’un camion de police. “Une policière m’a secoué et je n’ai pas perdu connaissance”, explique-t-il. Juste avant d’être emmené à l’hôpital, il a le temps de donner son téléphone aux forces de l’ordre. Le téléphone possède, en effet, “une application donnant accès aux caméras de surveillance du magasin”.
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“Mes amis sont morts, ce n’est pas facile”. “L’après” est difficile à gérer pour Patrice Oualid. “Moi, je suis en vie. Mes amis sont morts, ce n’est pas facile”, culpabilise-t-il. “Je suis sorti parce que je voulais sauver ma peau, alors je refais le film dans ma tête tous les soirs”, ajoute-t-il. “La nuit, je ne dors pas”, avoue-t-il, “je revois les images et me demande ce que j’aurais dû faire”.
Partir pour Israël. Le directeur de l’épicerie a déjà pris une décision : il ne retournera pas travailler à l’Hyper Cacher, “les caissières non plus”, révèle-t-il. Il partira bientôt en vacances en Israël et pense sérieusement à s’y établir définitivement. Les mots sont durs : “je ne suis pas de la chair à canon. La France est mon pays, j’y suis né. Il y faisait bon vivre, mais aujourd’hui ce n’est plus possible”.
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