L’INFO. Mieux vaut prévenir que guérir : c’est la logique qui suit l’adoption chez Paprec, le leader français du recyclage, d’une charte de la laïcité interne à l’entreprise. Cet événement est une première pour une entreprise implantée partout en France. La décision a été prise en réaction à la polémique sur le voile dans la crèche Baby-Loup. Elle a été approuvée par les 4.000 salariés de l’entreprise, eux-mêmes issus de 52 nationalités différentes.
Une charte en huit articles. Si l'essentiel du contenu de cette "charte" ne fait que rappeler des principes en vigueur du droit français, il reprend le "devoir de neutralité" religieuse ayant cours dans la sphère publique. Elle prévoit aussi que "le port de signes ou tenues par lesquels les collaborateurs manifestent ostensiblement une appartenance religieuse n'est pas autorisé".
Concrètement, l’idée est de ne pas voir de croix, de voile ou de propos prosélyte s’installer dans l’entreprise. "J'applique le modèle qui prévaut dans la sphère publique et je l'applique à l'entreprise. J'applique le modèle de la République", a déclaré le patron de Paprec, Jean-Luc Petithuguenin.
Un acte militant. La question de l’adoption de cette charte est notamment apparue au moment de la polémique sur le voile dans la crèche Baby-loup. Le groupe privé basé en Seine-Saint-Denis, régulièrement salué comme un modèle en terme de diversité et de promotion sociale, notamment d'employés d'origine étrangère, assume d’ailleurs sa position tranchée. Il souligne également l’union entre la direction et les employés de l’entreprise sur la question.
"S'il s'agit de reconnaître que c'est militant, la réponse est oui", assume le patron de l’entreprise. "On compte défendre notre point de vue, défendre qu'on l'a voté tous ensemble. Mais effectivement, on prend le risque que les tribunaux nous disent ‘vous avez tort’ ", a reconnu Jean-Luc Petithuguenin.
Prévenir les problèmes. Mais si l’idée de l’adoption d’une telle charte a émergé, c’est aussi pour éviter les débordements potentiels qui pourraient toucher la vie de l’entreprise. “Chacun de nous a sa vie privée qui ne doit pas être soumise au jugement dans la vie professionnelle”, confie Miroslav, employé dans l’entreprise depuis 1994, au micro d’Europe 1.
D’origine serbe, il est arrivé chez Paprec en 1994. Les ravages des guerres de religion, il les a connus dans sa jeunesse en ex-Yougoslavie. “J’ai bien vu la tragédie qui s’est passée là-bas. On a vécu pendant 50 ans en paix avec plusieurs nations et plusieurs religions. En quelques années, tout s’est transformé en une guerre terrible”, ajoute-t-il.
“Ca n’existe pas aujourd’hui, mais autour de nous, dans le monde et en France, on voit de plus en plus des montées nationalistes et fondamentalistes. Ca se passe autour de nous, on se demande si ça ne viendra pas chez nous. Pour que ça ne vienne pas, il vaut mieux prévenir que guérir”, conclut-il.
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