"On se réapproprie Paris". À 22h45, rue Saint-Denis, Pierre trinque joyeusement avec son groupe d'amis installé sur le trottoir face au bar. Comme beaucoup de fêtards, l'extension des terrasses, autorisée jusqu'à la fin septembre par la mairie de Paris pour aider bars et restaurants à compenser une partie de leurs pertes liées à la crise du coronavirus, fait son bonheur. Elle fait aussi celui du gérant de l'établissement qui, d'une trentaine de places, est passé à 70. "On n'a pas travaillé pendant trois mois", rappelle le responsable. Et le loyer à payer, lui, ne s'est pas arrêté. Avec l'extension des terrasses, "on travaille plus et c'est très important pour nous. Voilà, on dit 'merci Anne Hidalgo' !"
Mais d'autres n'ont pas la même gratitude envers la maire de Paris. C'est le cas d'Eric Roffé, membre du collectif de quartier Grenetta Goldoni. Les terrasses ? "Ça empêche les gens de dormir !" L'extension autorisée se fait normalement à la condition de tout remballer à 22 heures. Mais à 23h02 rue Saint-Denis, "on constate qu'il y a des tables, des chaises, des parasols et des installations de plus en plus permanentes", peste le riverain. "C'est une injustice totale. On nous demande de respecter le travail de ces établissements, mais on a aussi besoin de dormir. Je connais des personnels soignants qu'on applaudissait il n'y a pas si longtemps et qui sont dérangés par le bruit !"
Pas assez de "surveillance"
Dominique Feutry, président du collectif Marais-Louvre, enfonce le clou. "Cela s'est fait sans aucune concertation avec les habitants. La mairie a décidé sans aucune concertation et c'est ce qui nous surprend le plus." Lui s'étonne que d'autres commerçants, "fleuristes" ou vendeurs de prêt-à-porter, ne bénéficient pas de la même souplesse. Enfin, il déplore le manque de "surveillance" pour faire appliquer la règle des 22 heures. "Je ne crains pas que la situation dégénère mais que cette autorisation temporaire devienne permanente après le 30 septembre."
Du côté de la mairie de Paris, on parle de violations très limitées. Et on rappelle qu'un numéro d'appel et une application sur téléphone, "Dans ma rue", sont à la disposition des riverains pour dénoncer les abus.