"Je souhaite que soit généralisé le questionnement systématique des femmes sur les sujets de harcèlement et de violence par tous les professionnels de santé", a affirmé Emmanuel Macron, samedi, faisant des violences sexistes et sexuelles la grande cause nationale de son quinquennat. Tous les professionnels de santé... même les dentistes, dont la spécialité peut sembler éloignée du cœur du problème. À Rouen, trois formations ont déjà été organisées pour sensibiliser ces médecins, qui peuvent en faire plus qu'ils ne le croient.
Des comportements qui doivent alerter. Assistant à l'une d'entre elles, une quinzaine de dentistes aguerris ont le visage concentré. "Parmi les 200.000 femmes victimes chaque année de violences conjugales, il y en a forcément qui passent devant nous", commence la formatrice, Nathalie Ferrand. "On peut avoir des lésions, des fractures de dents, des marques violences sexuelles aussi :des fellations forcées notamment avec des hématomes au niveau du palais...." poursuit-elle. "Et ensuite, au niveau du comportement, un refus de pouvoir introduire des instruments dans la bouche par exemple."
" Avec un certificat médical, on décrit ce que l'on voit, et ensuite la patiente peut porter plainte "
Pas de formation en fac de médecine. Une patiente qui panique en étant allongée sur le fauteuil est peut-être en train de revivre une agression passée, apprennent ces dentistes. Après la première étude de cas, Corinne, l'une des participantes, s'interroge : "Est ce que j'ai laissé des femmes dans cette situation ?" Les signes à repérer ne sont pas enseignés en fac de médecine. "Et pour les hommes, c'est encore moins évident", renchérit Eric. "Une fois, j'ai posé la question de savoir si elle subissait des violences à une patiente. Elle s'est tout de suite renfermée."
"On n'est pas enquêteur, on n'est pas juge". Alors toute une journée, une psychologue et une juriste expliquent à ces dentistes comment mettre en confiance et libérer la parole, tout en restant à leur place. "Nous en tant que chirurgien dentiste on n'est pas enquêteur, on n'est pas juge. Avec un certificat médical, on décrit ce que l'on voit, et ensuite la patiente peut porter plainte", souligne Nathalie Ferrand. Un premier pas encouragé par les autorités : encore au stade de test, ces formations seront rendues obligatoires par le ministère de la Santé d'ici deux ans.