Bis repetita. Après un premier procès en appel avorté, la mère de Fiona et son ex-compagnon, rejugés par la cour d'assises de Haute-Loire pour la mort de la fillette en 2013, ont une nouvelle fois clamé leur innocence lundi.
"Jamais de ma vie, je n'ai frappé mes enfants". "Moi, jamais, jamais de ma vie, je n'ai frappé mes enfants", a lancé Cécile Bourgeon d'un ton péremptoire, visiblement prête à en découdre lors des deux semaines d'audience. "J'étais suivie par la PMI (service de protection maternelle et infantile, NDLR), les assistantes sociales. On me félicitait à chaque fois de leur bonne éducation car elles étaient admirables, polies. Personne ne m'a jamais vue frapper Fiona", a poursuivi la jeune femme de 30 ans, mère de deux autres enfants. "Je maintiens et je redis : je n'ai pas porté les coups mortels sur Fiona", a insisté l'accusée vêtue d'une tenue noire moulante, dont la frange blonde peroxydée masquait en partie son visage pâle.
Berkane Makhlouf "anéanti" par le premier verdict. La cour a entendu les mêmes dénégations de son ex-compagnon Berkane Makhlouf, 36 ans, qui n'accepte pas le verdict rendu en première instance par la cour d'assises du Puy-de-Dôme - elle l'avait condamné à vingt ans de réclusion contre cinq ans de prison pour la mère, reconnue coupable d'avoir fait croire à un enlèvement de la fillette mais acquittée des faits criminels. "J'ai été anéanti par la peine que j'ai reçue. Cécile avait reconnu que je n'avais pas porté de coups à Fiona, ils m'ont condamné quand même", a déploré l'accusé, emmitouflé dans un épais pull gris et tendu.
"Fiona, je serais incapable de lui faire du mal. J'aime (mes enfants). J'espère que ce procès va bien se dérouler et que je ne vais pas subir d'injustice (...) Ce n'est pas parce que (Cécile Bourgeon) a parlé la première qu'elle a raison", a ajouté cet homme au visage glabre. Interrompant de manière intempestive le président de la cour, Etienne Fradin, il a assuré notamment avoir "tenté de réanimer" la fillette.
La stratégie de défense des accusés n'a pas changé. Le premier procès, en 2016 à Riom, n'avait pas permis de faire la lumière sur la mort de Fiona, que les accusés disent avoir enterrée dans la nuit du 12 au 13 mai 2013 dans une forêt des alentours de Clermont-Ferrand mais dont le corps n'a jamais été retrouvé. Les deux anciens toxicomanes s'étaient rejeté la faute ou avaient avancé l'hypothèse d'un accident. En octobre dernier lors d'une première audience d'appel, les débats n'avaient pas plus avancé quand une passe d'armes - ou querelle d'ego - entre avocats avait fait capoter le procès devant cette même cour d'assises de Haute-Loire.
Et lundi, la stratégie de défense des accusés n'a pas varié d'un iota. "Elle a toujours dit : 'je n'ai jamais levé la main sur mes filles'. Comment voulez-vous que les lignes bougent ? Je pense que les lignes seront figées", a estimé devant la presse l'un des avocats de Cécile Bourgeon, Me Gilles-Jean Portejoie.
Trois nouveaux témoins. Mais les parties civiles espèrent bien faire bouger les lignes. Me Marie Grimaud, avocate de l'association "Innocence en danger", à l'origine de la passe d'armes lors du précédent procès en appel, a fait citer trois nouveaux témoins. "Il y a des détails qui n'ont jamais été abordés. J'estime que j'ai une ligne assez nouvelle. Peut-être qu'il y aura un autre procès. Cela va dépendre de cette vérité qui va émerger. On le saura au bout d'une semaine", a-t-elle dit avant l'audience.
"Des chaînons manquants". "Ce dossier, comme tous les taillis de la région, mérite d'être vérifié au peigne fin. Il faut chercher partout la vérité", a abondé Me Rodolphe Costantino, autre avocat des parties civiles. "Tout cela manque cruellement de cohérence car ce n'est pas une longue descente aux enfers pour Fiona comme on a pu le dire. Il y a eu un moment où les choses se sont dégradées brutalement sans qu'on sache pourquoi, il y a des chaînons manquants", a-t-il poursuivi.