Alors que Gabriel Matzneff, écrivain français, est rattrapé par ses écrits ouvertement pédophiles, se pose la question d'éventuelles poursuites à son encontre. Dans le JDD ce week-end, le secrétaire d'État chargé de la Protection de l'enfance, Adrien Taquet, a indiqué avoir "demandé à ses services de voir si des suites judiciaires pouvaient être envisagées" contre l’écrivain, et notamment sur la mise à disposition de ses livres. Mais il est quasiment impossible de les faire interdire aujourd'hui.
Une réédition pourrait être censurée
En effet, en matière de livre, c'est la loi de 1881 sur la presse qui s'applique. Et celle-ci prévoit les délais de prescription les plus courts qui existent en matière pénale : trois mois en général, un an exceptionnellement. Autant dire que les écrits de Gabriel Matzneff, dont les derniers mis en cause datent du début des années 2010, ne craignent rien d'un point de vue judiciaire.
En réalité, seule une réédition permettrait d'intervenir. "Si ses œuvres devaient être republiées, elles referaient courir à ce moment-là un délai de prescription", explique Me Eric Morain à Europe 1. "Cela permettrait soit à des associations soit à des personnes directement visées de pouvoir agir en justice pour les faire interdire, ou faire reconnaître qu'elles contiennent des passages offensants, que ce soit des atteintes à la vie privée ou des apologies de crimes ou de délits", en l'occurrence la pédophilie.
Une mesure administrative possible
En l'absence de réédition l’unique possibilité est une "mesure administrative, née de la loi de 1949 sur la protection de la jeunesse", précise Me Basile Ader, spécialiste du droit de la presse. "Elle permet au ministère de l'Intérieur, par arrêté, non pas d'interdire l'ouvrage mais d'interdire sa diffusion à tout public et d'en faire la publicité." Les livres pourraient par exemple être interdits à la vente pour les mineurs, ou il ne serait plus possible de les exposer à la vue du public, donc en vitrine.
De manière générale, il est très difficile en France d'intervenir contre un livre. "C'est le principe de la liberté d'expression", rappelle Me Basile Ader. "Il faut une atteinte très grave à des intérêts au moins aussi importants que celui de la liberté d'expression" pour que des mesures judiciaires soient prises.
Matzneff dénonce des attaques "injustes et excessives"
Joint par Le Parisien, Gabriel Matzneff a réagi à cette affaire en personne dimanche soir. Il a dénoncé "de si injustes et excessives attaques" à son encontre. Alors que ses écrits refont surface car l'une de ses anciennes relations, Vanessa Springora, qui avait 14 ans lorsqu'il l'a séduite, publie sa version de l'histoire dans un livre, Consentement, Gabriel Matzneff a insisté sur "la beauté de l'amour que nous vécûmes, Vanessa et [lui]".