Jeudi soir, lors d'une conférence de presse inédite depuis le début du quinquennat, Emmanuel Macron a annoncé un grand nombre de mesures censées répondre au malaise soulevé en novembre par les "gilets jaunes" et étayé par plusieurs millions de contributions lors du "grand débat national". Pourtant, ces annonces sont loin de faire l'unanimité chez les classes moyennes, les fonctionnaires ou les défenseurs de l'écologie, comme a pu le constater Europe 1.
Pour les classes moyennes, "le doute" sur l'effet concret des mesures
À Saint-Marcel-Paulel, près de Toulouse, Angélique, qui travaille dans le BTP, et Romain, serveur, sont un peu restés sur leur faim. À eux deux, ces parents de deux jeunes enfants qui gagnent un peu plus de 3.000 euros par mois n'ont pas perçu d'annonces qui pourraient changer profondément leur quotidien. "Sur certains points, c'est intéressant, sur l'aide pour les familles monoparentales, pour les personnes âgées, sur des personnes plus en difficulté que ma famille. Mais tout le monde attendait plus", estime Romain.
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Pour Angélique, le président a surtout donné de grandes orientations et insisté sur son bilan. "Il y a des belles paroles, mais est-ce qu'on a vraiment eu le détail ? Pour l'école, pour tout le monde, les classes où ils sont moins nombreux, des baisses d'impôts. Tant que ça ne sera pas effectif, on a quand même le doute", observe la mère de famille, qui dit percevoir "des changements" à son niveau depuis 2017 : "Ça se voit surtout sur la fiche de paye, comme avec l'exonération des charges sur les heures supplémentaires. Je l'ai gagnée, c'est 40 euros par mois et c'est bienvenu." Ils saluent aussi la reconduction de la prime exceptionnelle de fin d'année, exonérée de charges. Elle avait permis à Romain de toucher 700 euros en décembre dernier.
Chez les fonctionnaires, un bon signal mais des précautions
Côté fonctionnaires, Emmanuel Macron semble prêt à renoncer à l'une de ses promesses de campagne, à savoir l'objectif de 120.000 suppressions de postes. "Le président semble dire qu'il n'en fait plus un objectif à atteindre à tout prix", juge Baptiste Talbot, secrétaire général de la Fédération CGT des Services publics. "Il y a un autre élément qui est très important dans ce qu'a dit Emmanuel Macron, c'est l'idée qu'il n'y aura plus de fermetures d'écoles ou d'hôpitaux d'ici à la fin du quinquennat. On y voit aussi un signe important : le président se rend compte qu'il y a encore une fois une grosse attente sur les services publics de proximité dans ce pays, donc on y voit vraiment un signe d'encouragement à poursuivre la mobilisation."
" Il y a besoin de davantage d'emplois sur les tâches pour lesquelles nos collègues se trouvent au contact de la population "
Le chef de l'État a aussi indiqué vouloir remettre plus de fonctionnaires sur le terrain, avec plus de responsabilités et moins de monde dans les administrations centrales. "C'est une vision qui nous semble un peu caricaturale : il n'y a pas de postes inutiles aujourd'hui dans la fonction publique", insiste Baptiste Talbot. "Le vrai sujet est qu'il y a besoin de davantage d'emplois sur les tâches pour lesquelles nos collègues se trouvent au contact de la population." Et le syndicaliste de mettre en garde le gouvernement : "De toute façon, nous serons extrêmement attentifs à la manière dont le gouvernement opérera d'éventuelles restructurations."
Les écologistes déçus par l'ambition de Macron
"Pour nous, ce n'est pas à la hauteur de l'urgence climatique." Le constat de Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, est clair : la mise en place d’un "conseil de défense écologique" qui réunira les ministres dédiés pour faire les choix stratégiques sur le climat n'était pas le bon signal à envoyer en matière d'environnement, trois mois après l'annonce de la création d'un haut-conseil pour le climat. "On ne voit pas très bien en quoi ça va apporter des solutions concrètes et des réponses à l'urgence climatique."
"Il n'a pas annoncé de mesures concrètes comme on pouvait l'attendre sur la rénovation thermique du bâtiment, sur le développement des énergies renouvelables, sur une fiscalité plus importante pour les entreprises les plus polluantes. On est loin du compte", conclut, amer, le responsable de l'association écologiste.