Trois personnes blessées à l'arme blanche dont une au pronostic vital engagé, c'est le bilan de l'attaque survenue samedi matin en gare de Lyon à Paris. L'assaillant, un Malien de 32 ans avec des papiers italiens, a été interpellé et placé en garde à vue avant que celle-ci ne soit levée au vu de son état psychiatrique incompatible. Selon les informations d'Europe 1, l'homme, un sans domicile fixe, vivait dans le quartier depuis plusieurs mois, plus particulièrement sur la place Henri Frenay, où les habitants subissent depuis plusieurs années les incivilités de centaines de migrants installés dans le quartier.
"C'est un ras-le-bol"
À l'ombre des arches de la place, plusieurs silhouettes encapuchées abandonnent derrière eux les restes de leurs repas, juste devant la vitrine d'un magasin de musique. À l'intérieur, Eddy, l'un des vendeurs, constate une nouvelle fois les dégâts. "Vous avez tout un attroupement de personnes qui peuvent être sur des matelas. Ils boivent, ils mangent, ça fume, ça deal, c'est un ras-le-bol", déplore-t-il au micro d'Europe 1. Et la nuit, c'est encore pire : cris, bagarres, trafic de drogue, et parfois même agression. Dans la barre d'immeubles située juste au-dessus de la place, tous les riverains, comme Sophie, vivent un véritable enfer.
"Notre quotidien, c'est d'abord de voir des gens déféquer dans la rue devant nos enfants, de voir des dealers, de la délinquance. Je suis mère de trois enfants, dont une qui a 20 ans. Elle n'a pas le droit de sortir le soir ou alors je l'accompagne, je la ramène, mais je ne laisse pas mes enfants dans le quartier", admet-elle. Des nuisances qui ont commencé en avril 2021, explique-t-elle, au moment où plusieurs associations ont organisé sur la place des distributions alimentaires.
Des distributions alimentaires qui attireraient des centaines de personnes
Aujourd'hui présidente d'un collectif de riverains, Sophie dénonce l'inaction de la mairie. "Nous n'avons aucune réponse de sa part. Nous sommes furieux car nous lui avions dit qu'un drame allait survenir et le drame qui est arrivé a été perpétré par un individu qui traînait dans le quartier. Elle nous a méprisés, voilà ce qui est arrivé", alerte-t-elle. Le collectif réclame aujourd’hui la présence permanente de forces de police sur la place et l'encadrement des distributions alimentaires. Des distributions qui attireraient plus de 300 personnes et qui pouvaient durer jusqu'à deux heures du matin.
Sophie précise que les distributions alimentaires ont été interdites par la suite par le préfet Laurent Nuñez. "Ca va un peu mieux sur la place grâce à l'interdiction des distributions alimentaires et l'interdiction de la consommation et la vente d'alcool pour les commerces de proximité", souligne-t-elle sur Europe 1. En revanche, elle insiste sur le rôle de la mairie du 12e arrondissement. "Elle n'est que mépris envers nous depuis des années. On a même investi la maire pour nous faire entendre. La maire était à sa fenêtre, elle n'est même pas descendue à notre rencontre", déplore-t-elle.
Sophie va même encore plus loin. "Il y a un an et demi, dans la rue Roland-Barthes, qui jouxte la place Henri Fresnay, une famille avec trois enfants a assisté à une scène où un coup de feu a été tiré. Cette personne a filmé la scène, on voit l'individu tirer le coup de feu. Le lendemain, nous sommes allés fouiller et récupérer les douilles. En conseil municipal, monsieur Pierrick Paris, qui est responsable de la sécurité de la maire du 12e, nous a dit que nous mentions et que c'était des pétards qui avaient été tirés. Voilà le mépris de la mairie", raconte Sophie, désabusée.
De son côté, Christelle, elle aussi habitante de la place et présidente d'une association de riverains, décrit la même situation. "Au début, nous avions beaucoup de jeunes migrants non accompagnés qui se bâtaient souvent entre eux. Maintenant nous avons des adultes qui crient tout le temps et qui font leurs besoins sous nos coursives", explique-t-elle, pointant également le problème du trafic de drogue. "Les dealers s'installent sous nos coursives, l'été ils installent même des tables, des chaises...".
"On craint que ce qui est arrivé à la gare arrive sur la place"
De plus, les femmes riveraines seraient les cibles privilégiées des migrants sur la place. "On m'a dit que ma fille de 13 ans était 'bonne' et que je ne devais pas râler car à son âge au bled elle aurait des enfants", dénonce Christelle. "On a peur, on a vu des scènes assez violentes, comme des hommes qui se battaient et un qui est tombé dans les pommes. Ils ont caché son corps derrière un gros bac de fleurs. Ma fille croyait qu'il était mort, je lui ai dit que non mais en fait je n'en savais rien", se souvient-elle.
Tous demandent à la mairie d'agir, en instaurant notamment un point de police fixe sur la place. "On craint que ce qui est arrivé à la gare arrive sur la place", souffle Christelle.